Le Canada pourrait être l’un des principaux artisans du consensus à l’occasion des prochaines négociations internationales sur les changements climatiques, indique le ministre fédéral de l’Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault, tout en tentant de minimiser les inquiétudes soulevées par la récente victoire électorale de Donald Trump.
«Notre fenêtre pour empêcher la moyenne des températures mondiales de 1,5 degré Celsius est en train de se refermer. Nous devons tous nous diriger dans la même direction», dit M. Guilbeault.
La prochaine conférence internationale sur les changements climatiques se déroulera à Bakou, en Azerbaïdjan, du 11 au 22 novembre. Les observateurs s’attendent à des négociations difficiles. Les pays participants tenteront d’établir de nouveaux objectifs sur les investissements à réaliser pour lutter contre les changements climatiques et mettre en œuvre de nouveaux plans nationaux.
La directrice de l’International Climate Politics Hub, Catherine Abreu, croit qu’on a raison d’être cynique sur les résultats de ces négociations.
Malgré 30 ans de négociations, les émissions mondiales de gaz à effet de serre n’ont jamais été aussi importantes. Environ 80 % des ressources énergétiques utilisées sur l’ensemble de la planète proviennent des carburants fossiles. Et les lobbyistes payés par les sociétés pétrolières s’inscrivent de plus en plus à la conférence, observe Mme Abreu.
Toutefois, ces conférences sont un espace très important pour la discussion, ajoute-t-elle.
«Les accords conclus dans cet espace sont les fondements de presque toutes les politiques climatiques autour de la planète.»
Les priorités canadiennes
Le Canada devrait avoir deux grandes priorités: conclure une nouvelle entente sur le financement de l’action climatique et convaincre les autres pays de mettre en œuvre des plans ambitieux pour lutter contre les changements climatiques.
En vertu de l’accord de Paris, les pays doivent mettre à jour leurs programmes tous les cinq ans. Ces nouveaux plans devront être présentés en 2025.
Selon Julie Segal, membre de la direction d’Environmental Defence, ces deux priorités sont liées. On jugera du succès de la conférence si le Canada et les autres pays riches s’engagent à établir des objectifs financiers qui permettront de mettre en œuvre d’ambitieux programme contre les changements climatiques.
«Le Canada doit être un acteur. Il doit placer la barre haute. Il doit reconnaître que les pays riches comme le nôtre doivent mieux appuyer les pays plus vulnérables», juge-t-elle.
Différentes études laissent entendre que cette nouvelle aide financière devrait dépasser le billion de dollars.
Le Canada a souvent été le bon apôtre dans les négociations passées. Les pays développés s’étaient entendus en 2009 à augmenter annuellement leur aide de 100 $ d’ici 2020 pour aider les pays en voie de développement à lutter contre les changements climatiques. Il est reconnu comme étant un des pays ayant contribué le plus à mobiliser les ressources financières.
M. Guilbeault dit qu’il serait heureux que le Canada joue de nouveau son rôle d’établir des ponts au cours des négociations. Toute en refusant de commenter les montants à l’enjeu, il souligne l’importance d’aider les pays en voie de développement à avoir facilement accès à du financement.
Donald Trump
Le retour au pouvoir de Donald Trump pourrait faire de l’ombre sur la conférence.
Lors de son premier mandat, il a considéré les changements climatiques comme un canular et a aboli plusieurs mesures importantes. Il a retiré son pays de l’accord de Paris et signalé son intention de le faire de nouveau.
Même s’il ne sera pas assermenté avant janvier, certains pays pourraient prendre sa victoire comme prétexte pour faire dérailler la conférence, déplore Bill Hare, pdg du groupe de réflexion Climate Analytic.
«Beaucoup de travail sera nécessaire à la suite de l’élection de M. Trump. Il faudra s’assurer que le système ne s’effondre pas, mais sa victoire va relâcher la pression pour un résultat positif à Bakou», craint-il.
M. Guilbeault a minimisé les inquiétudes en soulignant que l’actuelle administration Biden représentera encore les intérêts américains au cours des prochaines négociations.
«Je suis persuadé que les États-Unis continueront d’être un partenaire important pour les prochaines négociations comme ils le sont depuis plusieurs années.»
Le ministre canadien espère même Elon Musk, un fervent allié de Donald Trump, exercera une influence positive sur le prochain président, notamment au chapitre de l’électrification.