Cumul de l’ancienneté durant une grève: un CISSS s’adresse à la Cour supérieure

Lia Lévesque, La Presse Canadienne
Cumul de l’ancienneté durant une grève: un CISSS s’adresse à la Cour supérieure

MONTRÉAL — La question du cumul de l’ancienneté durant une grève dans la santé se retrouvera devant la Cour supérieure, alors qu’un CISSS demande la révision d’une décision à ce sujet qui avait été favorable à la FIQ.

C’est le Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Abitibi-Témiscamingue qui s’adresse à la Cour supérieure pour lui demander d’annuler la décision à ce sujet du Tribunal administratif du travail.

Fin juin, le Tribunal administratif du travail avait accueilli les plaintes de membres de la Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ), estimant que «le choix de suspendre le cumul de l’ancienneté pour les personnes salariées à temps complet constitue en l’instance l’exercice de représailles liées directement à l’exercice de leur droit de grève».

Le Tribunal administratif du travail avait annulé la décision du CISSS de l’Abitibi-Témiscamingue d’interrompre l’accumulation de l’ancienneté des membres de la FIQ qui avaient fait la grève. Et il lui avait ordonné de rétablir leur ancienneté. Des membres de la FIQ avaient débrayé durant huit jours, en novembre et décembre 2023, tout en assurant les services essentiels.

Cette décision est maintenant contestée par l’employeur devant la Cour supérieure.

Dans sa requête, le CISSS se défend d’avoir agi en voulant imposer des mesures de représailles. «La décision de l’Employeur de ne pas cumuler l’ancienneté des salariées (à temps complet et à temps partiel) pendant leur temps de grève n’est aucunement motivée par l’antisyndicalisme; elle est fondée sur la législation québécoise et sur les dispositions de la convention collective.»

Le CISSS soutient surtout que l’article 59 du Code du travail lui permet de ne pas maintenir les conditions de travail en période de grève, comme l’accumulation d’ancienneté. Il affirme avoir ainsi «exercé son droit de direction de manière raisonnable».

Le CISSS dit aussi s’appuyer sur la convention collective. «Les salariées (à temps complet et à temps partiel) qui assurent les services essentiels ne sont pas en «absence autorisée» pendant leur temps de grève et que, de ce fait, elles n’accumulent pas d’ancienneté pendant leur temps de grève conformément au paragraphe 12.08 (5) de la convention collective».

Mais la FIQ souligne que la convention collective comprend une «clause de pont», c’est-à-dire une clause qui prévoit que les conditions de travail contenues dans la convention collective échue continueront de s’appliquer jusqu’à la signature d’une nouvelle convention.

Cette question du cumul de l’ancienneté lors de journées de grève intéresse aussi d’autres organisations syndicales et fait déjà l’objet de griefs, de sentences arbitrales et de contestations.

«Ces deux sentences arbitrales fortement contestées (qui concernent un autre syndicat et une autre convention collective) sont loin de démontrer que la question du cumul de l’ancienneté pendant les jours de grève est définitivement tranchée et, surtout, elles sont loin de démontrer que l’interprétation retenue par l’Employeur est «indéfendable» et «farfelue», conclut le CISSS dans sa requête.

La FIQ a dénoncé la requête du CISSS. Elle juge que «la demande de révision judiciaire est une manœuvre calculée et malveillante destinée à saboter l’audition prochaine de nombreux griefs déposés par la FIQ sur l’ensemble de son territoire. Cette démarche vise non seulement à contester les questions d’ancienneté, mais aussi à remettre en cause d’autres droits fondamentaux prévus par la convention collective, qui ont été suspendus de manière arbitraire par les directives gouvernementales pendant les journées de grève de 2023», a commenté la présidente de la FIQ Julie Bouchard, par voie de communiqué.

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