OTTAWA — La cheffe du Parti vert du Canada, Elizabeth May, affirme que les quelques députés identifiés dans le récent rapport d’un organisme de surveillance des services d’espionnage n’ont pas sciemment cherché à trahir le pays.
Mme May a déclaré mardi qu’elle était «extrêmement soulagée» après avoir lu une version non caviardée du rapport sur l’ingérence étrangère du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement.
Ce comité, composé de députés et de sénateurs, a révélé la semaine dernière dans un rapport caviardé que des députés avaient «sciemment aidé» les efforts d’États étrangers à s’immiscer dans la politique canadienne.
Ce rapport percutant a suscité une vague d’inquiétudes quant au fait que des parlementaires impliqués dans des activités d’ingérence étrangère pourraient toujours être actifs en politique.
Mme May, dont l’habilitation de sécurité de niveau «Très secret» lui a permis de consulter le rapport non caviardé, a déclaré mardi en conférence de presse à Ottawa que la version complète ne contenait pas de liste de députés qui avaient trahi le Canada.
Elle a donc assuré que depuis qu’elle a lu le rapport non caviardé, elle se sentait soulagée et ne ressentait «aucune inquiétude face à des collègues à la Chambre des communes».
Mme May a souligné qu’un ancien député accusé dans le rapport d’avoir «fourni proactivement» à un agent étranger «des informations reçues à titre confidentiel» devrait faire l’objet d’une enquête approfondie de la part des autorités. Elle a par ailleurs précisé que cet ancien député n’était pas identifié dans le rapport non caviardé.
Elle a aussi assuré que «moins d’une poignée» de députés étaient nommés dans le rapport complet, «et aucun d’entre eux ne pourrait être décrit comme ayant décidé de trahir sciemment le Canada en faveur d’un gouvernement étranger».
La cheffe des Verts n’a pas tardé à ajouter que les quelques personnes nommées dans le rapport non caviardé «pourraient être compromises», car elles étaient «les bénéficiaires de gouvernements étrangers intervenant dans des courses à l’investiture».
«Dire comme je le fais que je suis soulagée ne veut pas dire: ‘il n’y a rien à voir ici, les amis, alors oublions tout cela’, a précisé Mme May. La démocratie canadienne est clairement menacée par des gouvernements étrangers.»
La Chambre des communes prévoyait de voter plus tard mardi sur une motion du Bloc québécois qui demande d’élargir le mandat de la Commission sur l’ingérence étrangère pour lui permettre d’approfondir aussi les conclusions du rapport sur certains députés.
Le gouvernement libéral s’est joint cette semaine aux néo-démocrates et aux conservateurs pour exprimer publiquement son soutien à ce que la commission présidée par la juge québécoise Marie-Josée Hogue examine ces éléments.
Avant de lire le rapport non caviardé du comité, Mme May voulait appuyer la motion, mais elle a déclaré mardi qu’elle voterait maintenant contre. «Ce qui a été rendu public à l’heure actuelle est ce qui pouvait l’être», a-t-elle soutenu.
Mme May a indiqué que ceux qui disposent de l’habilitation de sécurité nécessaire pour lire le rapport non caviardé devraient le faire et «commencer à renforcer nos propres défenses contre les ingérences étrangères».
Interrogé par les journalistes mardi, le premier ministre Justin Trudeau a salué la décision de Mme May de demander son habilitation de sécurité et de «faire le travail d’entreprendre ses responsabilités en tant que leader d’un parti politique».
M. Trudeau en a profité pour critiquer le chef de l’opposition conservatrice, Pierre Poilievre, qui refuse de demander son habilitation de sécurité pour pouvoir consulter le rapport non caviardé.
La décision de Mme May «démontre ce que monsieur Poilievre devrait faire», a soutenu M. Trudeau. «Il devrait prendre ça au sérieux, il devrait aller chercher sa cote de sécurité et devrait pouvoir faire le travail nécessaire».