QUÉBEC — Le projet de troisième lien autoroutier Québec-Lévis aura franchi tellement d’étapes en 2026 qu’il sera à toute fin pratique «irréversible» et le prochain gouvernement y sera lié, estime Geneviève Guilbault.
La ministre des Transports était à Québec, vendredi, pour annoncer le lancement d’un appel d’intérêt international afin de trouver un partenaire privé pour construire le troisième lien. Elle prévoit la signature d’un contrat quelque part en 2027.
Mais à l’été 2026, «certaines étapes clés vont avoir été franchies», dont l’appel de qualification, a-t-elle expliqué, en laissant entendre qu’un prochain gouvernement qui voudrait abandonner le processus aurait à payer des «pénalités».
«Aujourd’hui, on franchit un premier jalon très concret et très important. Toute la planète est au courant qu’on se cherche un partenaire pour faire un troisième lien au Québec. C’est donc une excellente nouvelle.»
Rappelons qu’en juin dernier, après plusieurs tergiversations, le gouvernement Legault a relancé son projet de troisième lien autoroutier, même si la Caisse de dépôt et placement du Québec — et à peu près tous les experts — le déconseillait.
Le premier ministre François Legault évoquait alors la «sécurité économique»; selon lui, la région de Québec a besoin d’un autre pont près de l’île d’Orléans pour assurer le transport de marchandises par camion au cas où le pont Pierre-Laporte fermerait.
On ne sait toujours pas combien coûterait ce troisième lien interrives et le gouvernement n’a fixé aucune limite.
Vendredi, Mme Guilbault n’a rien exclu, y compris la possibilité de construire la future infrastructure au centre-ville et d’y inclure des voies réservées au transport collectif, des options qu’avait pourtant écartées le premier ministre en juin.
D’ailleurs, cette infrastructure pourrait être un pont ou un tunnel sous le fleuve Saint-Laurent, situé n’importe où entre le pont de Québec et l’Île d’Orléans, a affirmé la ministre Guilbault. Le corridor sera déterminé d’ici l’été 2025, a-t-elle dit.
La ministre s’est empressée de dire qu’elle comprend le «scepticisme» dans la population compte tenu des «tribulations» qu’a connues le projet, ayant elle-même annoncé sa mort, puis sa résurrection.
«On a une démonstration à faire du fait qu’on est résolument engagés et qu’on a l’intention de le réaliser une fois pour toutes. (…) Les gens ont besoin (…) de faits probants (…) et aujourd’hui, c’est une première étape très concrète.
«Quand tu pars sur le marché international, tu mets en jeu un peu ta crédibilité», a-t-elle déclaré.
«Fabulation»
«C’est une grande opération de retour vers le futur», a réagi vendredi le porte-parole de Québec solidaire (QS) en transports, Etienne Grandmont, tandis que le député péquiste Pascal Paradis a qualifié l’annonce du gouvernement de «fabulation» et de «poudre aux yeux».
«Ça fait 10 ans que la Coalition avenir Québec (CAQ) roule avec cette histoire. Ça n’arrivera pas, ça n’a aucune crédibilité, a pesté M. Paradis. La CAQ est prête à gaspiller encore des millions dans ces procédures-là qui n’aboutiront à rien.»
Le Parti québécois (PQ) ne s’engage pas à annuler le projet, parce qu’il n’y aura pas de projet, a-t-il répondu aux journalistes qui voulaient savoir si un gouvernement du PQ mettrait le troisième lien à la poubelle.
De son côté, le député Sol Zanetti a affirmé qu’il est «clair» que QS abandonnerait le projet en cas de victoire en 2026. «Le projet le plus efficace et le plus abordable, ça restera toujours du transport collectif sur les liens existants à Québec», a-t-il dit.
La ministre préfère faire «diversion» plutôt que de «faire progresser la mobilité dans la région de Québec», a déploré sur X le député libéral Monsef Derraji.
Depuis 2018, 34 millions $ ont été dépensés pour le projet de troisième lien, a indiqué vendredi le ministère des Transports.