QUÉBEC — Cinq organismes communautaires demandent au ministre des Finances, Eric Girard, d’améliorer d’urgence les conditions de vie de centaines de milliers de personnes en situation de pauvreté.
Ils ont tenu un point de presse conjoint à Québec, lundi matin, afin d’exhorter M. Girard à délier les cordons de la bourse lors de sa mise à jour économique du 21 novembre prochain.
Québec vit actuellement une «crise sociale» et le gouvernement Legault «réagit trop peu», a dénoncé la porte-parole du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), Véronique Laflamme.
Selon Marie-Line Audet, de la Table nationale des Corporations de développement communautaire, «il y a de l’itinérance maintenant qui est visible partout», même en région.
«Il y a des familles qui se retrouvent à la rue, des travailleurs qui se retrouvent à l’aide alimentaire. C’est là qu’on est rendus et ça ne fait qu’empirer», a-t-elle dit.
Plus de 940 000 personnes ont eu recours au service alimentaire en mars 2024, selon le Bilan-Faim. C’est une augmentation de 53 % comparativement à mars 2021, a-t-elle souligné.
Le milieu communautaire est «essoufflé» et «à bout de ressources», a déclaré Mme Audet, enjoignant le gouvernement Legault de «prendre ses responsabilités».
Les cinq organismes accusent le gouvernement d’être chiche; il a présenté un plan de lutte à la pauvreté doté d’un budget quatre fois moins important que celui du plan précédent.
Ils en ont aussi contre la Stratégie québécoise en habitation, qui ne comporte aucune cible précise de construction de logements sociaux ni mesure de contrôle des loyers.
En outre, la réforme de l’assistance sociale présentée par la ministre Chantal Rouleau ne prévoit aucune augmentation des prestations, dénoncent-ils.
Dans les circonstances, ils s’attendent à ce qu’Eric Girard s’engage notamment à:
– garantir que toute personne dispose d’un revenu suffisant pour couvrir, au minimum, ses besoins de base (24 000 $ par année);
– réaliser la construction de logements sociaux afin qu’ils composent, d’ici 15 ans, au moins 20 % du parc locatif, ce qui implique le financement annuel d’au moins 10 000 logements sociaux et communautaires;
– augmenter le financement des services publics pour en améliorer l’accessibilité et la qualité.
Lundi après-midi, le bureau de M. Girard s’est simplement dit «très sensible à aider les plus vulnérables».
Aide du fédéral: «pas à n’importe quel prix»
Pour lutter contre l’itinérance, le Québec ne devrait toutefois pas accepter l’aide d’Ottawa «à n’importe quel prix», a déclaré en point de presse Boromir Vallée Dore, du Réseau SOLIDARITÉ Itinérance du Québec.
En septembre, le gouvernement fédéral a annoncé une enveloppe globale de 250 millions $ pour aider les provinces à s’occuper du problème des campements de sans-abri.
Les provinces doivent, en échange, répondre à deux conditions: égaler le montant du fédéral et fournir un plan détaillé sur la manière dont l’argent sera dépensé.
Le gouvernement Legault n’a toujours pas signé d’entente, une position que défend M. Vallée Dore.
«Si le gouvernement fédéral veut influencer la vision qu’on s’est donnée au Québec, puis aller à l’encontre de ça, on ne peut pas accepter ça», a-t-il déclaré en point de presse.
«Il faut que l’argent arrive rapidement, mais cet argent-là ne peut pas arriver à n’importe quel prix.»
Vendredi dernier, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, a pourtant déploré que cette «bataille constitutionnelle» prive la métropole de sommes importantes, à l’approche de l’hiver.
Elle a affirmé que le Québec ne pouvait se permettre de laisser cet argent sur la table.
Or, les sommes offertes par le fédéral ne sont pas récurrentes, a rappelé M. Vallée Dore, lundi.
«Ce qu’il nous faut, c’est d’être capable de voir venir les financements. Ce financement-là ne nous permet pas de voir venir et se préparer de façon pérenne», a-t-il dit.
Le Réseau des Tables régionales de groupes de femmes du Québec et le Collectif pour un Québec sans pauvreté ont également participé au point de presse, lundi.