Francisation: même si les classes ferment, la CAQ plaide que le budget a augmenté

Patrice Bergeron, La Presse Canadienne
Francisation: même si les classes ferment, la CAQ plaide que le budget a augmenté

QUÉBEC — Au moins 150 membres de la CSQ ont perdu leur emploi en lien avec la réduction des services en francisation et 46 autres ont vu leurs tâches affectées par cette diminution, a précisé jeudi le syndicat, qui demande de lever les contraintes actuelles.

«Et ce n’est qu’une recension partielle» des pertes d’emplois, «il y a d’autres compressions qu’on n’a pas encore recensées et d’autres qui pourraient arriver en mars ou avril», a indiqué le président de la FSE-CSQ, Richard Bergevin, en entrevue avec La Presse Canadienne jeudi.

Accusé par l’opposition de provoquer la fermeture de dizaines de classes de francisation, le gouvernement caquiste riposte plutôt que le budget en francisation a augmenté.

Or des classes ferment ou devront fermer en Estrie ou en Abitibi et ailleurs sur le territoire.

À la période de questions, le premier ministre François Legault a indiqué que le budget est ainsi passé de 217 à 251 millions $, de 2023 à 2024, dont 104 millions $ aux centres de services scolaires (CSS).

Mais ce sont les règles budgétaires fixées par le ministère de l’Éducation qui sont en cause, a rappelé la CSQ, soit les paramètres sur la répartition des enveloppes.

«D’ici deux semaines, les groupes (de francisation) vont fermer et la crise va commencer. Nous, on souhaite être capable de dénouer l’impasse, on demande au gouvernement de retirer cette contrainte excessive», a dit M. Bergevin.

Les règles budgétaires émises par le ministère de l’Éducation plafonnent le nombre d’équivalents temps complet (ETP), soit le nombre d’heures de cours qu’ils peuvent offrir, à ce qu’il était en 2021, en pleine pandémie. C’est donc même inférieur à l’an dernier.

Les CSS interprétaient ces règles avec souplesse et considéraient ce plafond comme facultatif, mais ils ont été rappelés à l’ordre par le ministère de l’Éducation récemment, alors que depuis le début de l’année, ils répondaient à la demande abondante, selon l’analyse de la CSQ.

«Exceptionnellement, pour l’année scolaire 2024‑2025, une limite est fixée pour le personnel et les budgets en fonction de l’année scolaire 2020-2021», a déploré le député péquiste Pascal Paradis à la période de questions.

C’est le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, qui est ultimement responsable des règles budgétaires à l’Éducation, mais c’est son collègue responsable de la Langue française, Jean-François Roberge, qui a dû encaisser les coups.

«Est-ce que le ministre va renier son propre ministère qui a annoncé des coupures?» a lancé M. Paradis.

Le chef de l’opposition officielle, Marc Tanguay, a fait valoir que «rien ne va plus» en francisation et que la courbe de l’offre ne correspond plus à la demande.

Mais selon M. Legault, ce sont les centres de services scolaires qui posent problème, car ils ont dépensé en six mois leur budget pour toute l’année.

M. Roberge a pour sa part affirmé que de nouvelles classes de francisation ouvrent chaque semaine et qu’on francisera davantage de personnes cette année par rapport à l’an dernier.

«Entre le 1er juin et le 30 septembre 2023, l’année passée, les centres de services scolaires ont francisé 13 591 personnes et cette année, en 2024, dans les centres de services scolaires, du 1er juin au 30 septembre, ils ont francisé 32 040 personnes», a argué M. Roberge en Chambre.

«Quelle coupure déplorable!» a-t-il ironisé.

En mêlée de presse, il a par ailleurs blâmé le gouvernement fédéral pour avoir admis trop de nouveaux arrivants, ce qui fait que le Québec a du mal à les franciser.

«J’aimerais que le ministre me dise, à Québec, actuellement, où sont les fameuses classes qui ouvrent chaque semaine, dont il a parlé tout à l’heure, où sont les cours?» a demandé le député Pascal Paradis.

Le député libéral André A. Morin a renchéri en donnant de nombreux exemples de réductions de services partout sur le territoire.

«Que dit (le ministre) aux 1400 nouveaux arrivants qui devront se trouver un plan B faute de service? Que dit-il au centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys, qui coupe des classes en francisation faute de budget? Que répond-il à la commission scolaire Eastern Townships, qui lance un cri d’alarme, manque de financement? Que dit-il aux 329 apprenants inscrits au CSS des Découvreurs qui n’auront plus accès à la formation cet automne?»

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