NANAIMO — Le premier ministre Justin Trudeau se dit impatient d’en découdre avec le chef conservateur Pierre Poilievre dès la rentrée parlementaire de lundi qui sera aussi marquée par l’élection partielle dans LaSalle–Émard–Verdun où les libéraux pourraient mordre la poussière.
Questionné mercredi à savoir s’il considère que son leadership est en jeu si une défaite survenait, M. Trudeau n’a pas répondu directement, plaidant que «toutes les partielles sont importantes».
«Mais toutes les partielles sont aussi un moment où les Canadiens peuvent exprimer leurs inquiétudes, mais aussi leurs ambitions pour l’avenir», a-t-il dit en marge de la retraite du caucus libéral à Nanaimo, en Colombie-Britannique.
Selon M. Trudeau, l’enjeu de ce scrutin pour les électeurs est de décider s’ils préfèrent les compressions qu’un gouvernement de M. Poilievre ferait, selon lui, ou le plan libéral d’«investir dans les Canadiens».
«C’est le choix que les gens feront dans les partielles à venir. C’est le choix que les gens feront l’an prochain. J’ai hâte de continuer à m’y mettre cet automne», a-t-il lancé.
Le député Kody Blois espère que les gens sentiront un «changement de ton» de la part de ses collègues et lui. «Je pense que nous avons besoin de cibler plus précisément ce que M. Poilievre ferait ou non dans ce pays», a soutenu le député de la Nouvelle-Écosse.
En plus du scrutin dans le sud-ouest de Montréal, une autre partielle a lieu lundi dans la circonscription manitobaine d’Elmwood-Transcona.
LaSalle–Émard–Verdun est un bastion libéral. L’ancien ministre David Lametti l’a détenue de 2015 jusqu’à sa démission, en janvier dernier.
Avant un redécoupage électoral, l’ex-premier ministre Paul Martin représentait les électeurs d’une partie de la circonscription actuelle.
Mais dans un contexte où les libéraux sont à la traîne dans les sondages, LaSalle–Émard–Verdun pourrait être le théâtre d’une lutte à trois.
Si une défaite des libéraux survenait, il s’agirait d’un autre coup dur pour Justin Trudeau après que les conservateurs eurent raflé la circonscription de Toronto St-Paul’s.
Le siège était détenu par les libéraux depuis plus de 30 ans.
«Ça a blessé puis on a travaillé fort là-dessus, alors on a dû rectifier le tir», a affirmé le ministre de l’Immigration, Marc Miller.
La retraite du caucus qui se terminait mercredi était la première rencontre de l’ensemble des élus libéraux depuis cette défaite.
«J’ai confiance qu’on ait pu se dire les vraies affaires puis passer à autre chose», a poursuivi M. Miller.
Avant le début du lac-à-l’épaule, la députée de Brossard—Saint-Lambert, Alexandra Mendès, a dit à Radio-Canada avoir entendu que ses électeurs n’étaient plus du tout réceptifs à Justin Trudeau. Elle a fait savoir qu’elle entendait passer le message au premier ministre bien qu’elle ne soit pas, elle-même, en faveur d’un changement de chef.
Le député de Louis-Hébert, Joël Lightbound, a ensuite admis en mêlée de presse avoir entendu des électeurs lui dire qu’ils estiment que M. Trudeau doit partir.
Appelé à indiquer comment il entendait rallier son caucus derrière lui, M. Trudeau a fait valoir que des points de vue divers cohabitent parmi ses troupes comme dans la population générale.
«Les gens auront toutes sortes de perspectives différentes et c’est important d’avoir ça au sein du Parti libéral, a-t-il dit. La réalité est que nous sommes tous concentrés sur ce qu’il y a à faire pour s’assurer que les Canadiens reçoivent le soutien dont ils ont besoin», a-t-il offert comme réponse.
Le député libéral Marcus Powlowski estime que les partielles sont des occasions pour les électeurs d’exprimer leur insatisfaction sans que cela n’entraîne un changement de gouvernement.
L’élu de la circonscription ontarienne de Thunder Bay—Rainy River ne voit pas les scrutins de lundi comme un référendum sur M. Trudeau puisqu’il «sera premier ministre quel que soit le résultat».
M. Miller, bien qu’il estime que les partielles servent «parfois» aux électeurs «pour passer un message», croit que les libéraux l’emporteront dans LaSalle-Émard-Verdun.
«Je pense qu’on va gagner. (…) J’ai travaillé là-dessus et je suis confiant. J’ai parlé aux gens aux portes», a dit l’élu montréalais.
La veille, la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, une autre libérale de Montréal, s’est montrée tout aussi confiante. «On va gagner, j’en suis convaincue», a-t-elle lancé.
Quoi qu’il en soit, M. Powlowski croit que les Canadiens feront leur choix différemment à la prochaine élection générale que lors des élections partielles.
«Les gens sont mécontents face à Trudeau, mais, (en) contraste à Poilievre, je pense que les gens vont penser qu’ils ne l’aiment pas vraiment non plus», a-t-il dit.
Ce n’est pas ce que suggèrent, à l’heure actuelle, les sondages puisque les conservateurs maintiennent une importante avance sur les libéraux dans les intentions de vote nationales depuis environ un an.
Selon un sondage Léger publié mardi, les troupes de Pierre Poilievre recueillent 45 % d’appui, contre 25 % pour les libéraux. Les néo-démocrates suivent avec 15 %.
Selon M. Powlowski, le vent tournera quand les Canadiens connaîtront davantage M. Poilievre. À savoir s’il estime que M. Trudeau est toujours l’homme de la situation pour mener la barque libérale à bon port, le député a répondu «oui» sans développer davantage.
Interpellé sur la brièveté de sa réponse, il a ajouté qu’il s’attend à ce qu’«il gagne l’élection en fonction du contenu». «C’est différent, vous savez. La première fois (qu’il a été élu) en 2015, il était ce gars avec de beaux cheveux. Il était Trudeau (qui) a un genre de charisme.»
Une élection générale pourrait être déclenchée au cours des prochains mois, maintenant que les néo-démocrates se sont retirés de l’entente qui assurait aux libéraux de demeurer au pouvoir jusqu’en juin 2025.