QUÉBEC — La directrice nationale de la protection de la jeunesse, Catherine Lemay, a remis sa démission, lundi, au ministre responsable des Services sociaux, Lionel Carmant, qui lui avait demandé de quitter ses fonctions dans la foulée d’un nouveau scandale secouant un établissement.
Le départ de Mme Lemay survient quelques jours après des révélations médiatiques selon lesquelles au moins neuf éducatrices du Centre de réadaptation pour jeunes en difficultés Cité-des-Prairies, à Montréal, auraient eu des échanges sexuels avec au moins cinq résidants mineurs.
Il survient également alors que la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec a été mise sous tutelle en raison des révélations de «La Presse» concernant des enfants qui ont été placés trop rapidement en banque mixte en vue d’être adoptés.
En entrevue à Radio-Canada lundi matin, M. Carmant a fait savoir que c’est en raison de «différences d’opinions sur les mesures à prendre dans certaines situations» qu’il a demandé à Mme Lemay de démissionner.
Il a soutenu qu’il souhaitait avoir «quelqu’un qui est plus aligné» avec sa vision pour la suite des choses, dans un contexte où de «grands changements de culture» s’imposent dans les centres jeunesse.
Son bureau a indiqué à La Presse Canadienne qu’un directeur national par intérim sera nommé «rapidement». Mme Lemay garde toutefois son emploi de sous-ministre associée à la Direction générale du développement, du bien-être et de la protection de la jeunesse.
Carmant sur la sellette
Lundi, la porte-parole libérale pour la protection de la jeunesse, Brigitte Garceau, a demandé le renvoi immédiat de Mme Lemay comme sous-ministre. Elle s’est également interrogée sur le «jugement» de Lionel Carmant, qui a laissé les «scandales» s’accumuler, selon elle.
«Il manque un sens d’urgence dans ce dossier, et je me pose de sérieuses questions en termes de est-ce que M. Carmant est vraiment l’homme de la situation pour faire le changement, pour faire le ménage dans ce système, parce qu’on semble retarder des choses», a déclaré Mme Garceau en entrevue téléphonique.
Selon la députée libérale, le gouvernement Legault devrait se dépêcher de nommer son Commissaire au bien-être et aux droits des enfants. Le poste, qui a été créé en mai dernier avec l’adoption du projet de loi 37, n’est toujours pas comblé.
Brigitte Garceau dit également s’attendre à ce que le gouvernement donne suite à la recommandation du rapport Laurent d’instaurer une charte des droits des enfants, laquelle énoncerait les droits fondamentaux des jeunes Québécois.
De son côté, le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, a dit espérer que Mme Lemay ne serve pas de «bouc-émissaire». Il a rappelé en conférence de presse à Québec que Lionel Carmant est ministre responsable des Services sociaux depuis 2018.
«Un moment donné, on peut couper des têtes quand ça ne va pas bien, mais (…) ultimement, quand on est rendu à sa septième année de gouvernance, si ça ne change pas au niveau de la DPJ, c’est la responsabilité du gouvernement et du ministre. Moi, c’est de ça que je veux entendre parler», a-t-il déclaré.
Le député Guillaume Cliche-Rivard, de Québec solidaire, a franchi un pas de plus lundi après-midi en demandant à entendre le ministre Carmant en commission parlementaire afin qu’il rende des comptes.
«Remplacer (Mme Lemay) ne suffira pas à régler tous les problèmes. Le ministre a perdu le contrôle et il doit s’expliquer. Il est seul à la barre de la DPJ et la confiance de la population est brisée», a fait valoir M. Cliche-Rivard dans une déclaration écrite envoyée aux médias.