La fin de l’entente avec le NPD peut décourager des libéraux de changer de chef

Émilie Bergeron, La Presse Canadienne
La fin de l’entente avec le NPD peut décourager des libéraux de changer de chef

NANAIMO — La fin de l’entente entre le gouvernement minoritaire de Justin Trudeau et les néo-démocrates pourrait dissuader des députés libéraux de réclamer le départ de leur chef.

Deux anciens conseillers pour la formation politique sont d’avis que la possibilité qu’une élection soit déclenchée au cours des prochains mois risque d’en convaincre plus d’un que le temps manque pour un changement de capitaine.

Il n’en demeure pas moins qu’ils s’attendent à ce que M. Trudeau fasse face à la musique alors qu’il rencontrera son caucus réuni dès lundi pour une retraite de trois jours à Nanaimo, en Colombie-Britannique.

«Pour moi, le retrait du NPD de l’entente rend le départ de M. Trudeau moins probable. Est-ce que c’est impossible? Rien n’est impossible en politique, mais ça mettrait les libéraux dans une position délicate», croit Jeremy Ghio, directeur pour la firme de conseil TACT qui a travaillé auprès de la ministre Mélanie Joly.

Si les libéraux décidaient néanmoins de pousser M. Trudeau vers la sortie, «ils devraient être prêts à aller en élection avec un chef intérimaire, ce qui est loin d’être idéal», a-t-il dit en entrevue avec La Presse Canadienne.

Greg MacEachern, ex-stratège libéral aujourd’hui président de la firme de lobbying KAN Strategies, estime que les libéraux devront «composer avec les réalités actuelles» plutôt que de «déterminer ce qui pourrait en être» autrement.

«La fin de l’entente de soutien et de confiance signifie que la piste pour des chemins alternatifs avant la prochaine élection devient de plus en plus courte», a-t-il résumé.

Les conservateurs de Pierre Poilievre trônent en tête des intentions de vote dans les sondages depuis environ un an et les libéraux peinent à aplanir le fossé qui les place deuxièmes.

M. MacEachern anticipe que le caucus demandera des explications à M. Trudeau sur ce qui a été fait depuis la défaite de l’élection partielle dans Toronto-St. Paul’s.

Les conservateurs ont raflé cette circonscription ontarienne à la fin juin, arrachant aux libéraux un siège que ceux-ci détenaient depuis plus de 30 ans.

Plusieurs observateurs de la scène politique fédérale ont vu cette partielle comme un test pour le leadership de M. Trudeau et comme un indicateur potentiel de la bataille à venir lors du prochain scrutin général.

«Ce que j’entends du caucus et du personnel politique, c’est qu’ils veulent entendre que le bureau du premier ministre les a entendus et qu’il répond à leurs inquiétudes», a soutenu M. MacEachern.

Il estime qu’une façon simple de faire face à ces insatisfactions serait d’apporter des changements. Or, «il n’y en a pas eu beaucoup à part pour Jeremy Broadhurst, au bureau du parti», a dit l’ex-stratège en faisant référence à l’annonce du directeur national de campagne des libéraux qu’il démissionnait.

Selon M. Ghio, le départ de M. Broadhurst peut être vu comme une occasion d’apporter du renouveau, mais aussi comme une autre tuile qui s’abat sur Justin Trudeau.

«N’empêche que ça donne l’impression de coups durs qui s’accumulent pour Justin Trudeau. Là, c’est le départ de M. Broadhurst. Est-ce que M. Trudeau va aussi voir son lieutenant du Québec quitter pour la chefferie au Parti libéral du Québec? Ce n’est pas exclu.»

En effet, le ministre des Transports et lieutenant politique des libéraux pour le Québec, Pablo Rodriguez, songe à faire le saut sur la scène provinciale.

Quoi qu’il en soit, des députés libéraux fédéraux pourraient voir de façon positive la mort de l’entente avec les néo-démocrates puisque, note M. MacEachern, certains d’entre aux étaient inconfortables face à cet accord.

Ces élus pourraient donc avoir le sentiment que leur parti redevient «rouge» plutôt que «orange-rouge», ajoute-t-il, en mentionnant que la retraite du conseil des ministres lui a paru axée sur l’idée de «prendre soin des affaires».

«Il y a eu des signaux du côté des libéraux qu’ils devenaient plus centrés sur les affaires et l’économie», croit-il.

Aux yeux de Jeremy Ghio, une formule que devraient adopter les libéraux «est de mettre l’emphase sur leur équipe et de moins en moins sur Justin Trudeau» parce que, selon lui, le premier ministre constitue leur talon d’Achille.

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