Le tout nouveau président de la Commission des droits de la personne démissionne

Laura Osman, La Presse Canadienne
Le tout nouveau président de la Commission des droits de la personne démissionne

OTTAWA — Birju Dattani, qui avait été nommé en juin à la présidence de la Commission canadienne des droits de la personne, a annoncé qu’il avait accepté de démissionner lundi, à la suite d’une enquête sur des commentaires qu’il avait faits dans le passé concernant Israël.

M. Dattani avait auparavant nié les allégations selon lesquelles il aurait déjà fait par le passé des déclarations anti-israéliennes, y compris ce que les conservateurs à Ottawa qualifiaient de «justification du terrorisme».

Lorsque des organisations juives canadiennes ont soulevé des inquiétudes au sujet des activités passées de M. Dattani, le ministre fédéral de la Justice a demandé à un cabinet d’avocats de mener une enquête. Or, après avoir «examiné attentivement le rapport indépendant» ainsi que la réponse soumise par M. Dattani, le ministre Arif Virani estime aujourd’hui que «les conclusions sont claires».

«J’ai accepté la décision de M. Dattani de démissionner de son poste de président de la Commission, écrit le ministre lundi dans un communiqué. Comme je l’ai déclaré auparavant, ma plus grande priorité est de maintenir la confiance de la population canadienne à l’égard de la Commission canadienne des droits de la personne.»

Le long rapport du cabinet externe d’avocats détaille 14 allégations visant M. Dattani, y compris des commentaires qu’il avait publiés sur les réseaux sociaux et ailleurs sous le nom de «Mujahid» Dattani — un «mujahid» étant un combattant pour la foi islamique qui s’engage dans le djihad.

L’équipe du cabinet d’avocats qui a mené l’enquête n’a toutefois rien trouvé qui indiquerait que M. Dattani nourrissait «des croyances qui seraient qualifiées d’antisémites ou qu’il a démontré des préjugés (conscients ou inconscients) envers les Juifs ou les Israéliens».

Par contre, le cabinet Filion Wakely Thorup Angelett conclut que son explication pour ne pas avoir mentionné ce nom de «Mujahid Dattani» dans tout le processus de candidature et de vérification de ses antécédents manquait «de crédibilité».

Au lieu de cela, il a fourni le nom «Birju Mujahid Dattani», bien qu’il soit apparu sur plusieurs panels et qu’il se soit présenté sur les réseaux sociaux sous le seul prénom de «Mujahid».

«Selon la prépondérance des probabilités et d’après l’ensemble de la preuve, nous concluons que M. Dattani a intentionnellement omis la mention ‘Mujahid Dattani’ sur le Formulaire de consentement à une vérification des antécédents (et ailleurs) et qu’à aucun moment au cours du processus de demande ou d’entrevue, il n’a révélé que, dans le passé, il avait utilisé le nom ‘Mujahid Dattani’», lit-on dans le rapport d’enquête, rendu public par le ministre lundi.

Après avoir reçu ces conclusions, M. Virani a prévenu M. Dattani, dans une lettre datée du 31 juillet, que les résultats de l’enquête soulevaient de sérieuses préoccupations quant à son honnêteté et sa franchise pendant le processus de candidature.

M. Dattani devait assumer ses nouvelles fonctions à compter de jeudi dernier, mais il a accepté de prendre un congé pendant que le ministre Virani réfléchissait à la suite des choses après l’enquête.

Le démissionnaire a écrit lundi qu’il restait «un fervent partisan du travail de la commission, de son mandat et de son importance pour notre démocratie».

Les conservateurs ravis

La cheffe adjointe des conservateurs à Ottawa, Melissa Lantsman, qui réclamait son congédiement, a accueilli avec satisfaction cette nouvelle, qui arrivait un peu tard. «Les écrits passés de Dattani étaient facilement détectables avec une simple recherche sur Google», a écrit Mme Lantsman sur X.

«Soit le personnel politique du gouvernement Trudeau n’a pas effectué une recherche aussi rudimentaire, soit il a trouvé ce matériel et a considéré les commentaires comme non problématiques», écrit-elle, en réclamant une «enquête complète, libre et juste» sur tout le processus de sa nomination.

Le B’Nai Brith Canada demande aussi une «enquête approfondie» pour éviter ces «failles critiques dans le processus de sélection, qui doivent être corrigées (…) afin de protéger l’intégrité de notre démocratie», écrit l’organisme juif sur X.

Le Centre consultatif des relations juives et israéliennes s’est aussi réjoui lundi «que le gouvernement du Canada ait pris au sérieux les préoccupations de la communauté juive et ait lancé une enquête sur l’aptitude de Birju Dattani à diriger la Commission», compte tenu «des révélations sur ses associations avec des individus et des groupes liés à des entités terroristes répertoriées et de ses antécédents troublants en matière de déclarations antisémites».

Mais l’organisme Les Canadiens pour la justice et la paix au Moyen-Orient souligne que l’équipe qui a enquêté sur M. Dattani n’avait pas pu conclure qu’il nourrissait «des croyances qui seraient qualifiées d’antisémites ou qu’il a démontré des préjugés (conscients ou inconscients) envers les Juifs ou les Israéliens».

Le ministre assure par ailleurs lundi que le nouveau processus de nomination à la présidence de la commission commencerait «dès que possible».

«Je suis reconnaissant envers la présidente intérimaire, Charlotte-Anne Malischewski, pour ses services continus auprès de la population canadienne dans l’intervalle.»

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