TORONTO — Des centaines de magasins d’alcool de l’Ontario ont rouvert mardi, après une grève qui a duré plus de deux semaines. Mais les combats entre le syndicat représentant les travailleurs et le gouvernement se sont prolongés.
Environ 10 000 travailleurs de la Régie des alcools de l’Ontario (LCBO) sont rentrés lundi pour préparer l’ouverture de près de 700 magasins, après avoir quitté leur travail pour la dernière fois le 5 juillet.
Le Syndicat des employés de la fonction publique de l’Ontario, qui représente les travailleurs de la LCBO, a mentionné que le conflit de travail concernait en grande partie le projet du premier ministre Doug Ford de permettre aux dépanneurs et aux épiceries de vendre des cocktails prêts à boire. L’augmentation des ventes, estime le syndicat, constitue une menace existentielle pour l’avenir des travailleurs.
Les tirs isolés se sont poursuivis mardi, alors que le syndicat s’est indigné des commentaires de M. Ford, qui a déclaré lundi que la grève n’aurait jamais dû avoir lieu.
Le syndicat affirme avoir réalisé des «gains significatifs» comme conséquence directe de la grève.
«Les travailleurs de la LCBO sont fiers de ce qu’ils ont accompli dans le cadre de cette convention collective, ce qui n’aurait pas été possible sans la grève», a mentionné Colleen MacLeod, présidente de l’unité de négociation du syndicat à la LCBO. «Ils sont également heureux de retourner travailler au service de leur communauté.»
L’accord de trois ans, que les travailleurs de la LCBO ont ratifié la fin de semaine dernière, prévoit une augmentation salariale de 8 % sur trois ans, la conversion d’environ 1000 employés occasionnels en postes permanents à temps partiel et aucune fermeture de magasin pendant la durée de l’accord.
Le syndicat a indiqué que la conversion de ces postes occasionnels en 1000 emplois permanents à temps partiel et la garantie d’aucune fermeture pendant la durée du contrat n’étaient pas sur la table avant la grève.
Entre-temps, le gouvernement a déclaré que ses projets d’expansion de la consommation d’alcool donneraient aux Ontariens plus de choix et de commodité. Pendant la grève, M. Ford a même accéléré la date à laquelle les épiceries déjà autorisées à vendre de la bière et du vin pourraient ajouter des cocktails prêts à boire à leur offre, les épiciers pouvant passer des commandes à partir de jeudi dernier.
M. Ford a également déclaré lundi qu’il croyait que la LCBO avait un brillant avenir.
Des clients mitigés
À l’extérieur d’une LCBO de l’ouest de Toronto, Jay Brafman a fustigé les deux parties en cause.
«Je pense que (le syndicat) a essentiellement pris en otage les Ontariens et que ce n’est pas la bonne façon de tirer le meilleur parti de son travail», a ragé le client.
M. Brafman, partisan du projet du gouvernement visant à étendre les ventes d’alcool dans les magasins de proximité, a également critiqué M. Ford.
«S’il avait vraiment voulu faire preuve de courage, il aurait liquidé la LCBO», a-t-il plaidé.
M. Brafman, un buveur de vodka, a été pénalisé pendant la grève, car la LCBO est le principal vendeur de spiritueux dans la province.
«Cela m’a coûté énormément d’argent de devoir sortir dans les bars si je voulais boire» , a-t-il relaté, ajoutant qu’il était heureux que les magasins soient à nouveau ouverts.
Desi Noelneshak est passé dans un magasin pour acheter quelque chose de spécial pour sa «dame». Il cherchait une bouteille de vin qu’il ne trouvait pas dans son magasin Wine Rack local. S’il est heureux de pouvoir réintégrer la LCBO, il se dit également favorable à un accès élargi à l’alcool.
«Ils devraient l’avoir dans les dépanneurs», a-t-il avancé.
Graham Duncan faisait également partie de ceux qui se sont rendus dans les magasins rouverts. Il a dit qu’il soutenait les travailleurs et qu’il était heureux de les voir bénéficier d’augmentations de salaire et d’une meilleure sécurité d’emploi.
«J’ai toujours pensé qu’il était ridicule qu’ils aient autant de temps partiel étant donné le montant qu’ils gagnent chaque année», a-t-il soulevé.
«Mais le fait qu’une grande partie des ventes d’alcool va désormais passer entre les mains d’intérêts privées va priver les fonds publics de revenus et c’est également mauvais.»
Promesse électorale devancée
Le plan précédent de Doug Ford était d’introduire de la bière, du vin et des cocktails prêts à boire dans les dépanneurs et toutes les épiceries d’ici 2026, concrétisant ainsi une promesse électorale de 2018.
Mais en mai, il a annoncé que cela se produirait cette année, mettant un terme aux spéculations sur des élections anticipées que M. Ford n’a pas catégoriquement niées.
Les dépanneurs seront autorisés à vendre de la bière, du vin et des panachés à partir du 5 septembre, tandis que les épiceries nouvellement agréées pourront le faire à partir du 31 octobre.
Un «accord de mise en œuvre précoce» avec The Beer Store prévoit que la province paiera à l’entreprise jusqu’à 225 millions $ pour l’aider à maintenir ses magasins ouverts et à conserver ses employés.
La province accorde également aux brasseurs une remise sur les frais de la LCBO, qui leur rapportent normalement 45 millions $ par an, et elle accorde aux détaillants un rabais de gros de 10 %.