Les particules ultrafines causeraient 1100 décès prématurés par an à Montréal

Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne
Les particules ultrafines causeraient 1100 décès prématurés par an à Montréal

MONTRÉAL — Les particules ultrafines sont responsables de 1100 décès prématurés chaque année à Montréal et Toronto, conclut une étude réalisée à l’Université McGill.

Ces particules sont si infimes qu’elles peuvent aller se loger au plus creux des poumons et même entrer dans la circulation sanguine. Les recherches concernant leur impact sur la santé se poursuivent, mais on croit qu’elles pourraient contribuer à l’apparition de maladies pulmonaires, de maladies cardiaques et de cancers.

«J’ai été quelque peu surpris par la cohérence de nos résultats en ce qui concerne les différentes conséquences», a dit le professeur Scott Weichenthal, du département d’épidémiologie, de biostatistique et de santé au travail de l’Université McGill.

«Nous avons constaté une augmentation de la mortalité non accidentelle, de la mortalité respiratoire et cardiovasculaire et du cancer du poumon. Je pense donc qu’il s’agit d’une sorte de signal très cohérent de la manière dont ces particules contribuent réellement aux effets néfastes sur la santé.»

Les particules ultrafines proviennent principalement des émissions des véhicules et des activités industrielles. Aucun palier de gouvernement n’a imposé, au Canada, de concentration maximale pour ces particules, contrairement aux particules fines plus grosses, les particules PM2,5, avec lesquelles le public est peut-être plus familier.

Les particules ultrafines mesurent habituellement moins d’un micromètre et sont donc nettement plus petites que les PM2,5, a expliqué le professeur Weichenthal. En fait, elles sont si minuscules qu’on ne peut pas les mesurer de la même manière qu’on mesure les PM2,5, a-t-il ajouté: si on mesure la masse de PM2,5 présentes dans un mètre cube d’air, on mesurera plutôt le nombre de particules ultrafines dans un centimètre cube.

«Si on mesure seulement la masse, on ne mesurera pas vraiment l’exposition aux particules ultrafines», a-t-il dit.

Avec les PM2,5, a-t-il ajouté, «on peut installer un petit nombre de moniteurs dans toute la ville et ainsi se faire une idée assez précise de ce à quoi la population est exposée, car ces particules ne varient pas beaucoup dans l’espace».

En revanche, «les particules ultrafines varient beaucoup dans l’espace, même d’un coin de rue à l’autre, et donc on ne peut pas installer un seul moniteur dans une ville et prétendre qu’il représente l’exposition de tout le monde dans cette ville», a-t-il poursuivi.

«On a vraiment besoin de ce genre de modèles d’exposition à haute résolution pour capturer les variations à petite échelle entre les villes», a expliqué le professeur Weichenthal.

Le professeur Weichenthal et ses collègues ont étudié les taux de pollution atmosphérique enregistrés entre 2001 et 2016 dans des quartiers de Montréal et de Toronto regroupant 1,5 million d’adultes.

En utilisant des méthodes d’analyse sophistiquées, les scientifiques ont pu estimer la quantité de particules ultrafines présentes dans l’air à divers moments. Ils ont ensuite utilisé des méthodes statistiques afin d’établir une corrélation entre le taux d’exposition et le risque de décès.

Les preuves des effets des particules ultrafines sur la santé sont encore en cours d’élaboration. Les chercheurs ont quand même déterminé qu’une exposition à long terme semble augmenter le risque de mort non accidentelle de 7,3 %. Les décès liés aux maladies respiratoires affichent une augmentation de 17,4 %, devant les décès causés par une maladie coronarienne, qui ont connu une hausse de 9,4 %.

La pollution de l’air modifie les mécanismes fondamentaux liés à l’inflammation et au stress oxydatif, qui sont essentiels à de nombreux processus pathologiques, allant des maladies cardiovasculaires aux cancers en passant par les maladies respiratoires, a expliqué le professeur Weichenthal.

Aujourd’hui, a-t-il ajouté, «nous voyons même apparaître des études portant sur les conséquences neurologiques, car nous savons que ces particules pénètrent dans le cerveau des gens».

«Je pense que nous avons fait du très bon travail en matière de réglementation des PM 2,5 et de réduction des expositions, a-t-il dit en conclusion. Mais si on veut vraiment réduire les effets sur la santé de la population des expositions environnementales telles que la pollution de l’air, les particules ultrafines doivent probablement figurer sur cette liste.»

L’étude est le fruit d’une collaboration entre l’Université McGill, l’Université de Toronto, l’Université Carleton, l’Université d’Ottawa, Santé Canada et Statistique Canada. Elle a été financée par le United States Health Effects Institute.

Ses conclusions ont été publiées par l’American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine.

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