Les personnes souffrant du syndrome de la personne raide ont encore peu de ressources

Camille Bains, La Presse Canadienne
Les personnes souffrant du syndrome de la personne raide ont encore peu de ressources

Les ressources pour les personnes atteintes du syndrome de la personne raide demeurent rares au Canada, et obtenir un diagnostic peut être ardu. Une citoyenne de l’Ontario peut en témoigner.

Robyn Cook décrit comme un «épisode au travail» le spasme soudain et bouleversant de tout le corps qui l’a envoyée aux urgences, cinq ans avant que son mystérieux ensemble de symptômes ne soit diagnostiqué comme le syndrome de la personne raide.

«Je ne pouvais pas ouvrir la bouche parce que ma mâchoire faisait des spasmes», a-t-elle raconté à propos de l’expérience effrayante de 2012 qui l’a empêchée d’appeler à l’aide depuis son bureau dans une banque.

«Mon bras gauche était collé à moi et mon corps avait des spasmes du cou, de l’épaule, du torse, du tronc et même des hanches», a déclaré Mme Cook, originaire de North Bay.

Mme Cook, aujourd’hui âgée de 46 ans, affirme que les signes de la maladie neurologique auto-immune ont commencé à l’âge de 23 ans. Son dos s’est raidi à cause d’une douleur qui l’a projetée au sol et un incident débilitant similaire huit ans plus tard l’a forcée à arrêter de travailler pendant cinq mois.

«Ces épisodes n’arrêtaient pas de se produire où l’on se disait : «Oh, mon dos a lâché. Je suis coincée. Je ne peux pas bouger. Je heurte le sol et je rampe vers mon lit. Mais personne ne pouvait dire que quelque chose n’allait pas chez moi».»

Mme Cook s’est retrouvée aux urgences environ 25 fois, craignant à chaque fois d’être perçue comme une chercheuse de pilules concoctant ses symptômes parce que la maladie était peu connue au Canada et qu’il n’y avait pas de groupe de défense pour soutenir les patients.

Les symptômes se sont aggravés après l’épisode au travail de 2012 et Mme Cook s’est sentie de plus en plus isolée. Elle craignait de tomber et a commencé à utiliser une canne à quatre pattes à la maison en 2015. L’année suivante, elle est devenue dépendante d’un fauteuil roulant chaque fois qu’elle quittait la maison.

«Quand j’avais mes pires spasmes, j’étais au lit. Ils apparaissaient généralement quand je dormais. C’était un peu comme dans «L’Exorciste», les spasmes courbés dans le dos qui faisaient léviter votre dos», a-t-elle déclaré, faisant référence au film d’horreur de 1973.

Le médecin de famille de Mme Cook a soupçonné une fibromyalgie et l’a orientée vers un rhumatologue qui a rapidement exclu cette maladie, qui provoque des douleurs corporelles, mais sans rigidité ni spasmes musculaires. Il l’a envoyée chez un physiatre, spécialiste en médecine physique et en réadaptation.

Après un an de traitement incluant des injections intraveineuses de kétamine et de Botox pour aider à gérer les spasmes musculaires, la physiatre a envisagé la possibilité d’une maladie rare impliquant son cerveau et son système immunitaire.

«Il a en fait été le premier à dire : «Avez-vous déjà entendu parler du syndrome de la personne raide ?». J’ai dit : «Non, ça semble ridicule».»

Ce n’est qu’en 2022 que le syndrome de la personne raide attirera l’attention du monde entier, puisque la maladie a forcé la chanteuse Céline Dion à annuler des concerts en raison de ses propres symptômes débilitants. La vedette internationale a déclaré dans une série d’entrevues récentes que, comme de nombreux patients, elle a passé des années à chercher un diagnostic et s’est tournée vers des analgésiques pour gérer la douleur et les spasmes.

Un traitement expérimental

Alors qu’elle devenait plus malade, Mme Cook a déclaré qu’elle prenait 120 milligrammes de Valium par jour, des analgésiques et des relaxants musculaires, ne lui laissant qu’une seule option quelques mois après son diagnostic en 2017. Il s’agissait d’un traitement expérimental risqué qui consistait à prélever des cellules souches de sa moelle osseuse, à éliminer son système immunitaire par de la chimiothérapie, puis à transplanter ces cellules souches pour régénérer son système immunitaire.

Le meilleur scénario était que cela stopperait la progression de la maladie, pour laquelle il n’existe aucun remède.

Mme Cook a affirmé que sa greffe de cellules souches a impliqué une guérison extrêmement difficile, mais qu’elle lui a «redonné sa vie».

Elle était la cinquième patiente à subir cette intervention à l’Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa depuis 2009.

Le Dr Harold Atkins, chercheur clinique principal de l’Institut, a déclaré que sept Canadiens — cinq femmes et deux hommes — ont subi cette procédure, qu’il a décrite comme une option «de fin de parcours».

«Certaines personnes ne présentent plus de symptômes et ne prennent plus de médicaments, tandis que pour d’autres, la maladie est réapparue, mais de façon moins grave et plus facile à traiter», a-t-il expliqué.

Le Dr Atkins, un médecin spécialiste des greffes de cellules souches, a déclaré qu’il ne connaissait aucun neurologue au Canada spécialisé dans le syndrome de la personne raide. La procédure de transplantation est réservée «aux très rares personnes qui présentent des symptômes suffisamment graves et qui ne répondent pas aux autres traitements».

«Nous sommes très sélectifs, car la greffe de cellules souches comporte des risques importants», a indiqué le Dr Atkins, également professeur agrégé à l’Université d’Ottawa.

Une procédure similaire est parfois utilisée pour les patients atteints de cancer, notamment ceux atteints de lymphome et de myélome, a dit le Dr Atkins.

Les efforts de son équipe ont abouti à la première étude rapportée sur la greffe de cellules souches chez deux patients atteints du syndrome de la personne raide, a-t-il souligné. Elle a été publiée dans la revue médicale JAMA Neurology en 2014.

Les patients comprenaient une femme traitée en 2009, cinq ans après avoir été diagnostiquée à 48 ans, et une autre qui l’a eue en 2011 à la suite de son diagnostic trois ans plus tôt, à l’âge de 30 ans.

La première personne était à nouveau pleinement mobile six mois plus tard et la seconde a repris ses activités précédentes sans aucun symptôme un an plus tard, indique l’étude.

Le Dr Atkins a précisé qu’il connaissait au moins neuf cas de transplantation aux États-Unis.

Une «odyssée diagnostique»

Céline Dion a déclaré que la neurologue du Colorado, la Dre Amanda Piquet, l’avait diagnostiquée et soignée, et que la fondation de la chanteuse avait fait don de 2 millions $ sur cinq ans à l’hôpital UCHealth de l’Université du Colorado pour la recherche sur les maladies auto-immunes, notamment le syndrome de la personne raide.

Dans un communiqué publié la semaine dernière par le campus médical Anschutz de l’Université du Colorado, la Dre Piquet a affirmé que l’argent permettra d’élargir la recherche pour diagnostiquer la maladie plus tôt pour ceux qui «se retrouvent dans cette odyssée diagnostique».

«Il y a beaucoup d’anxiété et de phobies que l’on peut constater avec cette maladie. J’ai fait travailler certains patients avec un thérapeute en traumatologie», a raconté la Dre Piquet à propos d’une maladie qui, selon elle, touche deux personnes sur 100 000, et non une sur un million comme on le pensait auparavant.

Le Dr Marinos Dalakas, directeur de la division neuromusculaire de l’Université Thomas Jefferson de Philadelphie, a déclaré qu’il étudiait le syndrome de la personne raide depuis environ 30 ans et qu’il avait actuellement près de 100 patients, certains provenant d’autres pays, dont le Canada.

Les greffes de cellules souches ont produit des résultats mitigés, mais seul un petit nombre d’études portant sur quelques patients ont été réalisées aux États-Unis, a-t-il indiqué.

Le Dr Dalakas a déclaré que depuis que Céline Dion a révélé qu’elle souffrait du syndrome de la personne raide, certains patients sont devenus, à tort, convaincus qu’eux aussi en souffraient, tandis que d’autres, mal diagnostiqués, sont également en train d’émerger.

Dans l’ensemble, une sensibilisation accrue pourrait signifier davantage de financement pour les essais cliniques conduisant à de meilleurs traitements, a-t-il soutenu.

Il y a près de deux ans, Mme Cook est retournée travailler à temps plein en tant que directrice de succursale d’une coopérative de crédit. Elle suit toujours des traitements réguliers de physiothérapie et de chiropratique, et continue de prendre des médicaments, notamment du Valium, qu’elle a réduit à 10 milligrammes par jour.

Cependant, Mme Cook a déclaré qu’elle avait dépensé au moins 100 000 $ en voyages et en hôtels pour des rendez-vous dans diverses villes du Canada, y compris Ottawa, où les coûts incluaient le loyer et les aides personnelles pendant les 100 jours de sa convalescence.

Elle souffre toujours de légers spasmes que «la personne moyenne trouverait douloureux», même s’ils ne perturbent pas ses activités quotidiennes.

Mme Cook consulte plusieurs spécialistes dont un neurologue, un urologue, un dermatologue, un rhumatologue et un psychiatre pour le traumatisme de la greffe. Elle continue également d’avoir des rendez-vous de suivi avec le Dr Atkins.

Elle espère qu’une attention accrue portée au syndrome de la personne raide apportera davantage de soutien aux patients, dont beaucoup ont relativement peu d’options au-delà de la gestion de leur douleur.

«La personne moyenne atteinte du syndrome de la personne raide souffre d’un manque de ressources.»

Le contenu en santé de La Presse Canadienne obtient du financement grâce à un partenariat avec l’Association médicale canadienne. La Presse Canadienne est l’unique responsable des choix éditoriaux.

Partager cet article
S'inscrire
Me notifier des
guest
0 Commentaires
Inline Feedbacks
Voir tous les commentaires