Les phénomènes météorologiques extrêmes causent de l’anxiété, à court et long termes

Hina Alam, La Presse Canadienne
Les phénomènes météorologiques extrêmes causent de l’anxiété, à court et long termes

FREDERICTON — Jennifer Moore aidait un voisin sur leur rue sujette aux inondations à Windsor, en Nouvelle-Écosse, la semaine dernière, lorsqu’elle est tombée tête première dans de l’eau brune jusqu’à la taille, dans son entrée de garage.

C’était la troisième fois en trois ans que le puisard de la rue débordait, après que 1,2 mètre de pluie, souillée par les eaux usées, se soit déversée dans le sous-sol de Mme Moore sur la route qui traverse cette ville de la vallée de l’Annapolis.

«C’était terrifiant», a-t-elle déclaré lundi, alors qu’elle s’apprêtait à se précipiter pour se faire vacciner contre l’hépatite et le tétanos dans une clinique locale.

Parfois, ajoute-t-elle, elle ne sait pas si des symptômes comme les maux de tête, les nausées et la diarrhée font simplement partie d’une réaction de stress ou d’un état physique causé par l’exposition à la dernière catastrophe climatique dans sa ville.

Car les psychologues affirment que la détresse à laquelle sont confrontés Mme Moore et ses voisins fait partie d’une croissance inquiétante des problèmes de santé mentale et des traumatismes liés à la multiplication des inondations et autres catastrophes climatiques qui surviennent à travers le pays. Ces expériences ont été documentées dans des études menées au cours de la dernière décennie.

Trois ans après une précipitation abondante en août 2014 à Burlington, en Ontario — 196 mm de pluie étaient tombés en sept heures, inondant 3500 résidences —, le Centre Intact d’adaptation au climat de l’Université de Waterloo a publié une enquête sur l’impact psychologique de ces phénomènes météorologiques.

Un stress éprouvant

Les chercheurs ont découvert que 48 % des quelque 500 victimes de catastrophes ont déclaré qu’après chaque précipitation importante, après celle de 2014, leur niveau de stress était de 4,5 sur une échelle de 5, ce qui représente un «stress mental maximal».

Mme Moore, qui a acheté sa propriété en 2009, a déclaré que depuis 2021, elle a dû utiliser à trois reprises sa pompe de taille industrielle pour évacuer environ 1,2 à 1,5 mètre d’eaux usées de son sous-sol. «C’est très, très éprouvant mentalement» et «ça crée une panique» à chaque fois qu’une alerte météo annonce des orages dans la région, a-t-elle avoué.

«On doit alors réorganiser nos journées pour que si (la rue) déborde, nous puissions être à la maison. Nous avons annulé des vacances et des voyages parce que nous ne pouvions pas laisser notre maison sans surveillance.»

Parfois, elle intériorise simplement sa détresse et dresse une liste des mesures qu’elle peut prendre pour garder sa maison aussi sécuritaire que possible. Mais souvent, elle se sent «complètement paralysée» par l’anxiété.

Des effets parfois durables

Stefania Maggi, professeure de psychologie à l’Université Carleton, a expliqué qu’un événement météorologique extrême, comme un incendie, une inondation ou une canicule, peut avoir des conséquences psychologiques durables.

«Souvent, il y a ce sentiment écrasant que le changement climatique est si important et un défi si difficile à surmonter que nous nous sentons totalement impuissants», a-t-elle expliqué dans une récente entrevue.

Theodore Cosco, professeur agrégé au département de gérontologie de l’Université Simon Fraser, ajoute qu’une exposition répétée à des événements météorologiques extrêmes pourrait affecter les gens à très court terme, mais aussi à plus long terme.

Un impact à court terme dû à des dommages matériels, à la perte de vies humaines ou à la perte d’une habitation pourrait provoquer un syndrome de stress post-traumatique. À long terme, il pourrait y avoir une anxiété généralisée autour de la prochaine catastrophe climatique potentielle et de l’incertitude créée, a-t-il expliqué.

En fonction de l’âge de la personne et d’autres conditions préexistantes, la professeure Maggi soutient qu’il est possible que l’anxiété et le stress provoqués par le changement climatique et les phénomènes météorologiques puissent entraîner des troubles du sommeil, de la nervosité et des changements d’humeur et d’appétit.

«En général, ce sont des effets à court terme qui ont tendance à se résorber après plusieurs jours ou quelques semaines, mais parfois, ils durent (…) plusieurs semaines, voire des mois.»

Amanda Dunfield, la voisine de Mme Moore, estime qu’une partie de la détresse vient du sentiment que les dirigeants politiques municipaux et provinciaux n’agissent pas assez rapidement pour réparer et moderniser les infrastructures – ou pour proposer des offres raisonnables pour acheter leurs maisons.

Pendant ce temps, déménager n’est pas une option, en raison des bas prix offerts pour les maisons dans sa région.

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