McGill ferme son campus et procède au démantèlement du campement propalestinien

Mathieu Paquette, La Presse Canadienne
McGill ferme son campus et procède au démantèlement du campement propalestinien

MONTRÉAL — Une importante opération a eu lieu mercredi matin à l’Université McGill, au centre-ville de Montréal, alors que la direction de l’université a décidé de procéder au démantèlement du campement propalestinien installé sur son campus depuis la fin avril.

«Le campement représente une menace de plus en plus importante pour la santé et la sécurité. C’est pourquoi, dans une optique de protection de la communauté de l’université et de l’intégrité de notre propriété, la décision a été prise de démanteler le campement installé sur le terrain inférieur du campus du centre-ville», a annoncé la direction de McGill dans un communiqué publié en matinée.

Vers 6 heures, des membres du Service de sécurité de McGill ont commencé à informer les manifestants qu’ils allaient devoir partir. Certains participants ont quitté le campement et ont amorcé une manifestation dans les rues à proximité.

Des agents du Service de police de la Ville de Montréal ont été dépêchés sur place, en soutien. De nombreux policiers à vélo, la cavalerie et des agents de la Section du support et interventions spécialisées ont été déployés.

Dans un message transmis à la communauté universitaire, le recteur de l’Université McGill, Deep Saini, a mis de l’avant trois raisons pour justifier le démantèlement du campement:

– La plupart des campeurs sont des militants de groupes externes qui ne font pas partie de la communauté mcgilloise. Des personnes sans-abri dormiraient aussi dans le campement depuis quelques nuits, selon lui;

– Deux cas de surdose seraient survenus dans le campement depuis samedi et le camp aurait été le théâtre de vente illégale de narcotiques. «De plus, le campement est infesté de rats. Enfin, un réservoir de propane et des matériaux inflammables situés à proximité des tentes pourraient provoquer un incendie», a-t-il avancé;

– Le campement continue d’attirer des manifestants «partisans de la violence», à son avis.

«Ce campement n’avait rien de pacifique. C’était une véritable forteresse vouée à l’intimidation et à la violence, érigée en grande partie par des personnes n’appartenant pas à notre communauté universitaire», a-t-il soutenu.

Selon M. Saini, le démantèlement du campement «marque une étape importante vers le retour à un climat sain sur le campus, un climat propice à l’enseignement, à l’apprentissage et à la recherche».

La direction a par ailleurs fait appel à une entreprise externe de sécurité pour procéder au démantèlement.

La ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, a salué cette décision.

«On a largement dépassé la liberté d’expression usuelle, alors je pense que c’est une bonne chose qu’on procède au démantèlement de ce campement. Il était temps de démanteler le campement. Je soutiens McGill dans ses démarches», a-t-elle dit en point de presse, soulignant que «la situation s’est envenimée au cours des derniers jours avec des actes de vandalisme, des actes antisémites, de la casse et de la violence à l’intérieur du campement».

Le campus fermé

Afin de procéder au démantèlement du campement, la direction de l’université a annoncé la fermeture du campus du centre-ville pour la journée. Les événements prévus mercredi ont été annulés et la communauté universitaire a été priée de ne pas se rendre sur les lieux.

Les cours d’été qui devaient se tenir sur le campus ont plutôt eu lieu en virtuel. Les bibliothèques ont quant à elles été fermées.

En réaction à l’annonce du démantèlement, le Centre consultatif des relations juives et israéliennes et la Fédération CJA ont salué le fait que l’Université McGill prenne des mesures pour «donner la priorité à la sécurité et au bien-être de sa communauté universitaire, et pour mettre fin à la toxicité, à la glorification haineuse du terrorisme et au ciblage des étudiants juifs sur le campus».

Les manifestants ont installé leur campement à la fin avril, dans la foulée de manifestations similaires qui avaient lieu sur d’autres campus universitaires en Amérique du Nord.

Les participants revendiquaient que l’université mette fin à ses investissements dans des entreprises qui profitent de l’opération militaire d’Israël dans la bande de Gaza et que la direction coupe les ponts entre McGill et les universités israéliennes.

Plusieurs manifestants ont promis de poursuivre le combat malgré le démantèlement.

«Les étudiants sont déterminés dans leur lutte», a déclaré Zeyad Abisaab, un étudiant de l’Université Concordia.

Zaina Karim, étudiante à McGill et porte-parole du campement, a exprimé sa colère contre l’établissement. Elle a rapporté qu’il y avait encore une douzaine de personnes à l’intérieur du site qui refusaient de bouger jusqu’à ce que «leurs demandes soient satisfaites».

Zaina Karim, qui n’était pas à l’intérieur du campement lorsque le démantèlement a commencé, a fait savoir que les manifestants persisteraient jusqu’à ce que l’université révèle et rompe ses liens avec Israël.

«Ce n’est pas du tout la fin. Les étudiants sont plus motivés que jamais à continuer de se battre», a-t-elle assuré.

Négociations rompues

À deux reprises, des demandes d’injonctions visant à forcer le démantèlement du campement ont été rejetées par la Cour supérieure.

La tension au campement a atteint un point culminant le 6 juin, lorsque des manifestants se sont introduits dans le bâtiment administratif de l’université. La police était intervenue et avait procédé à l’arrestation de 15 personnes.

Des négociations ont eu lieu entre les organisateurs du campement et la direction de McGill, lors desquelles l’université a proposé des mesures pour répondre à certaines demandes des manifestants, mais les pourparlers n’ont pas convaincu les participants de démanteler le campement.

«Tant que McGill continuera à financer le génocide en cours en Palestine, nous poursuivrons une campagne d’escalade sur le campus», ont écrit les manifestants dans une publication sur Instagram au début du mois de juillet.

D’autres campements installés ailleurs au Québec ont été démantelés par les manifestants à la suite d’ententes avec les universités concernées. La semaine dernière, la Ville de Montréal a de son côté procédé au démantèlement d’un autre campement qui avait été érigé au square Victoria.

– Avec les informations de Joe Bongiorno

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