«Resserrement de l’étau» pour les simples visiteurs qui demandent l’asile, dit Miller

Émilie Bergeron, La Presse Canadienne
«Resserrement de l’étau» pour les simples visiteurs qui demandent l’asile, dit Miller

OTTAWA — Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) «a pris plusieurs mesures pour resserrer l’étau à l’interne» face à une hausse des demandes d’asile faites par des ressortissants étrangers arrivés au pays avec des visas de visiteur, affirme le ministre Marc Miller, assurant que d’autres actions viendront.

«Il y a du travail, il y a un certain resserrement de l’étau à faire additionnels», a-t-il dit au cours d’une récente entrevue avec La Presse Canadienne.

M. Miller a indiqué que le ministère dont il est responsable effectue déjà des ajustements en raison d’une «flambée» de cas où des visas «notamment de l’Inde ou du Bangladesh» ont été utilisés.

«Ce n’est pas la façon de faire si on prétend venir ici pour voyager ou peu importe la raison, donc il y a du travail à l’interne qui se fait à ce niveau-là», a lancé l’élu montréalais durant l’entretien accordé dans son bureau de la colline du Parlement.

De plus en plus de ressortissants étrangers réclament l’asile après avoir mis les pieds au Canada au moyen d’un visa de visiteur. Leur nombre mensuel a quintuplé d’avril 2023 à avril 2024, a rapporté le quotidien «La Presse» plus tôt ce mois-ci.

IRCC a fourni à La Presse Canadienne des données montrant que le nombre de personnes détenant un «visa de résident temporaire» ou «visa de visiteur» et ayant demandé l’asile au Canada est effectivement passé de 1815 à 10 170.

Le ministère a précisé que, «au moment de la demande, tous les demandeurs de statut de résident temporaire doivent convaincre un agent qu’ils ont des liens suffisants avec leur pays d’origine, notamment en ce qui concerne leur situation familiale et économique, et qu’ils quitteront le Canada à l’expiration de leur statut».

«Certains résidents temporaires viennent au Canada en tant que véritables visiteurs, étudiants ou travailleurs et choisissent ensuite de demander l’asile en raison de l’évolution de la situation dans leur pays d’origine», a-t-on ajouté.

Or, en parlant de l’afflux de demandeurs d’asile constaté depuis plusieurs années – peu importe la façon dont ils arrivent au Canada – le ministre Miller a soutenu que «ça ne peut pas continuer face au volume qu’on voit».

Un nouveau comité a été créé pour se pencher sur cette tendance, de même que sur la répartition interprovinciale des demandeurs d’asile, et doit effectuer des travaux au courant de l’été.

Enrayer la hausse des demandes

Le «resserrement de l’étau» mentionné par le ministre sera à l’agenda «du groupe de travail», a-t-il dit, évoquant aussi les discussions, au sens plus large, avec ses homologues des provinces.

Le premier ministre du Québec, François Legault, réclame depuis sa rencontre du 10 juin avec son vis-à-vis fédéral, Justin Trudeau, qu’Ottawa fasse baisser de 50 % les demandeurs d’asile se trouvant en sol québécois. Il demande aussi une baisse dans la même proportion pour les travailleurs étrangers temporaires en provenance du Programme de mobilité internationale.

MM Trudeau et Miller répondent depuis qu’ils doivent d’abord recevoir un plan de la province. Néanmoins, Ottawa s’est engagé à favoriser le déplacement volontaire de demandeurs d’asile habitant au Québec vers d’autres provinces canadiennes.

En février, le fédéral a accédé à une demande de Legault – également formulée par bien d’autres – de rétablir l’obligation de visa pour les voyageurs mexicains. Les libéraux de Justin Trudeau avaient retiré cette exigence en 2016.

Le retour de l’exigence de visa «a réduit de 98% depuis quelques mois les demandeurs d’asile en provenance du Mexique», a affirmé M. Trudeau après sa rencontre avec M. Legault.

Au moment d’annoncer ce changement de politique qui avait vexé le gouvernement mexicain, M. Miller avait ouvert la porte à un resserrement des exigences de visas pour les visiteurs en provenance d’autres pays.

Questionné à ce sujet, quatre mois plus tard, le ministre est resté vague.

Quoi qu’il en soit, les ajustements «à l’interne» qu’il a évoqués en donnant en exemple l’Inde et le Bangladesh n’auront pas le même impact que le retour d’exigences de visa pour les Mexicains, a-t-il prévenu.

«Le défi, c’est que ça ne fera pas la même différence (…) évidemment parce que ces deux pays maintenant ont déjà des visas qui sont prérequis.»

Quand M. Trudeau a insisté sur l’effet de la réimposition de visas pour les visiteurs mexicains, il a aussi profité de l’occasion pour féliciter son gouvernement d’avoir colmaté la brèche du chemin Roxham en mars 2023, en mettant en place, avec les États-Unis, une nouvelle mouture de l’Entente sur les tiers pays sûrs (ETPS).

Avant la renégociation de cet accord, l’ETPS faisait en sorte qu’un réfugié potentiel présentant une demande d’asile en sol canadien était refoulé s’il avait d’abord foulé le sol américain et s’il présentait sa requête après être passé par un poste-frontière officiel.

Ainsi, des personnes souhaitant tout de même demander l’asile au Canada traversaient la frontière par des passages de fortune comme le chemin Roxham, en Montérégie. Une fois qu’elles avaient officiellement mis les pieds au pays, leur demande d’asile pouvait être traitée.

Selon le nouvel EPTS, le renvoi dans le premier «pays sûr» survient peu importe si le demandeur d’asile est entré par un poste-frontière officiel ou non officiel. En d’autres mots, les termes de l’accord prévoient qu’il est appliqué uniformément sur tous les 8900 km de la frontière canado-américaine.

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