CALGARY — TC Énergie vend une participation minoritaire dans son réseau de transport de gaz naturel de l’Ouest canadien à un consortium de communautés autochtones pour 1 milliard $.
La société établie à Calgary a précisé que cet accord, annoncé mardi, permettra à 72 communautés autochtones de prendre une participation de 5,34 % dans son réseau de gazoducs «Nova Gas» et dans les pipelines «Foothills», qui composent ensemble un réseau de 25 000 kilomètres d’actifs d’infrastructure de gaz naturel couvrant l’Ouest canadien.
L’accord, soutenu par l’«Alberta Indigenous Opportunities Corp.», a été négocié par un comité de consortium représentant les communautés autochtones de l’Alberta, de la Colombie-Britannique et de la Saskatchewan.
En incluant la dette, l’entente a une valeur d’entreprise totale de 1,65 milliard $, ce qui en fait le plus important accord de participation autochtone jamais conclu au Canada, soutient TC Énergie.
En tant qu’actionnaires, les communautés autochtones recevront des flux de trésorerie prévisibles et à long terme provenant des gazoducs, dont les revenus sont soutenus par des tarifs réglementés par le gouvernement fédéral.
«Nous en sommes arrivés à un point où nous avons créé un partenariat qui, non seulement donne la priorité à nos besoins dans nos communautés autochtones, mais aussi crée des investissements à long terme dans nos communautés qui s’étendront à des générations bien au-delà de la mienne et de la vôtre», a affirmé Lee Thom, un conseiller de l’établissement métis Kikino de l’Alberta et membre du comité du consortium, lors d’une conférence de presse au siège social de TC Énergie à Calgary, mardi après-midi.
Le président et chef de la direction de TC Énergie, François Poirier, a qualifié l’accord d’étape importante «attendue depuis longtemps».
«Je vais le dire simplement: la propriété autochtone est la voie vers une nation plus prospère, a-t-il déclaré aux journalistes. La propriété autochtone dans l’économie des ressources naturelles du Canada devrait être monnaie courante. C’est la meilleure façon pour les industries de partout au pays de continuer à fonctionner et à croître.»
«Imaginez si nous — le Canada, notre industrie, notre entreprise TC Énergie — avions adopté cette approche il y a des décennies. Imaginez tout ce que nous aurions pu accomplir, tout ce que nous aurions pu construire ensemble et combien d’avantages auraient été créés pour les communautés autochtones», a-t-il ajouté.
Le chef Isaac Twinn, président du comité du consortium et chef de la communauté autochtone de Sawridge, près de Slave Lake, en Alberta, croit que «les investisseurs autochtones bénéficieront de ce partenariat pendant quelques années encore».
Un intérêt croissant
Les communautés autochtones de partout au Canada manifestent un intérêt croissant pour l’acquisition de participations dans des projets et des infrastructures majeurs, afin de générer des revenus et des opportunités économiques pour leur population.
En 2022, par exemple, Enbridge a conclu un accord de 1,1 milliard $ pour vendre une participation de 11,57 % dans sept pipelines du nord de l’Alberta à 23 communautés des Premières Nations et métisses.
Plusieurs groupes dirigés par des Autochtones ont également manifesté leur intérêt pour l’achat d’une participation dans l’oléoduc Trans Mountain, qui appartient actuellement au gouvernement fédéral.
Cet intérêt pour l’actionnariat survient à un moment où le Canada s’est engagé dans un processus de réconciliation avec les Autochtones, un engagement qui comprend la reconnaissance du droit des peuples autochtones à l’autodétermination économique.
Jusqu’à présent, la majeure partie de cette activité a porté sur le secteur énergétique de l’Ouest canadien, où les infrastructures telles que les oléoducs et les gazoducs, ainsi que les parcs éoliens et solaires, sont souvent situées sur des territoires traditionnels des peuples autochtones.
Les entreprises énergétiques profitent de ces accords, car l’«acceptabilité» au sein des communautés autochtones est de plus en plus essentielle pour la construction et l’exploitation de grands projets.
«Un nombre sans précédent de communautés autochtones de l’Alberta, de la Saskatchewan et de la Colombie-Britannique ont déjà exprimé leur intérêt à faire partie de ce partenariat», a affirmé mardi la première ministre de l’Alberta, Danielle Smith.
«Cela démontre clairement que de nombreux Autochtones soutiennent notre industrie énergétique – ils veulent en faire partie.»
Mais les communautés autochtones ont toujours été confrontées à des difficultés pour accéder au capital nécessaire à des transactions majeures en matière de capitaux propres. Or, la situation commence à changer.
L’Alberta Indigenous Opportunities Corp. (AIOC) est une société d’État albertaine créée en 2019; elle offre des garanties de prêt allant de 20 millions $ à 250 millions $ pour les projets admissibles. Dans le cas de l’accord avec TC Énergie annoncé mardi, l’AIOC fournira aux communautés une garantie de prêt en actions d’un milliard de dollars pour soutenir le nouveau partenariat d’investissement.
«En seulement quatre ans, l’Alberta Indigenous Opportunities Corporation a véritablement eu un impact sur les communautés autochtones», a déclaré la première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, dans un communiqué. «Ce tout nouvel accord s’appuie sur des succès antérieurs et montre au Canada et au monde que les partenariats énergétiques avec les Premières Nations et les Métis sont non seulement souhaitables, mais possibles.»
Une fois l’entente finalisée, les communautés concluront des accords définitifs en tant que co-investisseurs dans le réseau de gazoducs. Chaque communauté décidera indépendamment de participer ou non à cette entente.
TC Énergie a déclaré que la transaction devrait être finalisée au troisième trimestre de cette année, mais qu’elle est soumise à la réception des résolutions des conseils de bande et du règlement, ainsi qu’au financement.
Dans son budget de cette année, le gouvernement libéral fédéral a annoncé la création d’un programme national de garantie de prêts aux Autochtones, pour aider justement les communautés à accéder au capital et à éliminer les obstacles aux investissements en actions.