Un petit rorqual aperçu dans la région de Montréal, sa survie est menacée

Katrine Desautels, La Presse Canadienne
Un petit rorqual aperçu dans la région de Montréal, sa survie est menacée

MONTRÉAL — Le chef d’un groupe de recherche sur les mammifères marins confirme que pour la deuxième fois en deux ans, une baleine a été aperçue dans la région de Montréal. La survie du petit rorqual serait sérieusement menacée s’il devait rester trop longtemps dans ce secteur. 

Robert Michaud, du Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins, indique qu’un petit rorqual a été aperçu pour la première fois dimanche dans le fleuve Saint-Laurent près du parc Jean-Drapeau, à quelque 450 kilomètres en amont de son habitat habituel.

Le petit rorqual peut atteindre près de huit mètres de long à l’âge adulte. Pour l’instant, il n’y a pas d’observation qui permet d’évaluer la taille de la baleine qui se trouve dans le chenal Le Moyne. Robert Michaud indique toutefois que ce semble être un jeune animal. 

Un expert est en route vers Montréal et il pourra faire des observations plus détaillées si la baleine est toujours là mardi, notamment pour estimer son âge. 

Le petit rorqual nage présentement à contre-courant dans le chenal Le Moyne, situé entre l’île Sainte-Hélène et l’île Notre-Dame. Cet environnement est hostile pour lui, explique M. Michaud. 

«Ces animaux vivent en eaux salées habituellement. S’ils sont exposés longtemps en eau douce, ils peuvent développer des problèmes physiologiques. Moins longtemps il restera dans le secteur de Montréal, plus ses chances de survie seront meilleures», assure l’expert. 

Il n’y a pas beaucoup de navires qui voyagent dans le chenal Le Moyne. Le danger pour la baleine est davantage le chemin qu’elle doit parcourir jusqu’au parc marin Saguenay – Saint-Laurent, «où elle devrait se retrouver», en raison du trafic maritime. 

Ce sont des animaux migrateurs qui viennent dans le parc marin Saguenay – Saint-Laurent en été et au printemps, explique M. Michaud. Ils vont s’alimenter jusqu’en automne avant de repartir vers l’Atlantique. 

Cela laisse croire que le petit rorqual est arrivé dans l’estuaire du Saint-Laurent il y a quelques semaines à peine.

Deux baleines en deux ans 

L’observation survient près de deux ans après qu’une autre baleine, une baleine à bosse, a passé plusieurs jours à la vue de curieux dans le Vieux-Port de Montréal.

Cette baleine a été retrouvée morte en juin 2020, et une autopsie a suggéré que l’animal de 10 mètres de long aurait pu être heurté par un bateau.

Cette baleine était restée presque deux semaines en eau douce et sa condition s’était sérieusement détériorée. Comme le petit rorqual est de beaucoup plus petite taille, il n’a «pas autant de réserve qu’un rorqual à bosse».  

«On espère le voir reprendre le chemin vers l’aval beaucoup plus rapidement», souligne M. Michaud. 

Les deux baleines sont deux événements isolés, selon Robert Michaud. Il indique qu’il n’y a pas de données qui laissent croire qu’il y a plus de baleines qui s’égarent de nos jours. Ça reste toutefois un phénomène assez rare. 

«Depuis 2005, c’est la dixième fois qu’on observe un petit rorqual en amont de Québec. La majorité des observations étaient des carcasses, mais deux fois auparavant on a vu des petits rorquals qui n’avaient pas été revus, on présume donc qu’ils avaient pris le chemin de l’aval», mentionne Robert Michaud. 

Il n’est pas clair pourquoi l’une ou l’autre des baleines ferait un si long voyage dans un habitat d’eau douce qui n’est pas sain pour elle. Il dit que les jeunes animaux ont peut-être exploré à la recherche de nourriture ou se sont simplement perdus.

«Chez toutes les espèces animales incluant chez les baleines, il y a des individus qu’on appelle parfois des vagabonds qui errent, qui font une série d’erreurs dans leur navigation et qui aboutissent dans un endroit inusité ou inapproprié», détaille M. Michaud. 

Une équipe a été déployée pour observer le petit rorqual, mais M. Michaud affirme qu’ils ne peuvent pas faire grand-chose pour l’aider à part avertir les plaisanciers d’être prudents et espérer qu’il fasse demi-tour et retourne en aval.

Il existe peu d’options pour repousser l’animal dans ces situations. Il est possible d’utiliser du son ou une barrière pour repousser le mammifère marin. «Mais la route entre Montréal et son habitat naturel est trop longue pour croire qu’une telle intervention pourrait être couverte de succès», fait savoir M. Michaud. 

Le Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins suivra la situation de près avec Pêches et Océans Canada. «Pour l’instant, on n’a aucune information scientifique valable qui nous laisse croire qu’on devrait faire autrement que laisser l’animal à son propre sort tout en lui assurant un séjour paisible», affirme l’expert. 

Il demande aux plaisanciers de ne pas s’approcher par curiosité pour voir l’animal. Advenant que la baleine reparte vers son habitat naturel, des avis à la navigation seraient réitérés aux bateaux.  

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