MONTRÉAL — Un simple test sanguin pourrait permettre d’identifier les femmes les plus susceptibles de souffrir d’une maladie cardiovasculaire trente ans plus tard, démontre une étude publiée par le prestigieux New England Journal of Medicine.
Cela pourrait ouvrir la porte à des interventions hâtives, comme une modification du style de vie, pour réduire les risques de maladie des décennies plus tard.
«On ne peut pas assurer la causalité puisque ce n’est pas une étude qui a été faite de façon prospective, a commenté la chirurgienne cardiaque Jessica Forcillo, qui est la cofondatrice du Centre d’expertise CardioF du CHUM.
«Mais on peut voir qu’il y a une association, donc ça peut nous donner des indices par rapport à quelle femme (…) serait plus à risque de développer la maladie dans le futur. C’est de l’information supplémentaire qui nous aide à mieux dépister et à prévenir les maladies.»
Des chercheurs des Instituts nationaux de la santé (NIH) des États-Unis ont mesuré dans le sang deux types de gras ainsi que la protéine C-réactive, un marqueur de l’inflammation.
Les quelque 28 000 femmes étudiées provenaient toutes du secteur de la santé et participaient, depuis 1992 ou 1995, à la gigantesque Women’s Health Study américaine. Pendant un suivi de trente ans, 3662 d’entre elles ont été victimes d’un infarctus du myocarde, d’un accident vasculaire cérébral ou d’un décès de cause cardiovasculaire. D’autres ont eu besoin d’une chirurgie pour rétablir une circulation normale.
Les chercheurs des NIH ont constaté que les femmes qui présentaient les niveaux les plus élevés de cholestérol LDL avaient un risque de maladie cardiaque 36 % supérieur à celui des femmes qui présentaient les niveaux les plus faibles.
Le risque de maladie cardiaque était supérieur de 33 % et de 70 % chez les femmes avec, respectivement, les niveaux les plus élevés de lipoprotéine(a) et de protéine C-réactive, toujours en comparaison avec les femmes aux niveaux les plus faibles.
Lorsqu’on combinait ces trois mesures, le risque d’AVC était 1,5 fois plus grand et celui de maladie coronarienne trois fois plus grand chez les participantes qui présentaient les niveaux les plus élevés.
«Chaque biomarqueur a contribué de manière indépendante au risque global, écrivent les auteurs de l’étude. La plus grande dispersion du risque a été obtenue dans les modèles qui incorporaient les trois biomarqueurs.»
Et même si l’étude a porté uniquement sur des femmes, les chercheurs croient que les résultats seraient très similaires chez les hommes.
Face à ces résultats, les auteurs de l’étude réitèrent les conseils habituels pour favoriser la santé coronarienne: une activité physique régulière, une alimentation bonne pour le cœur, un sommeil de qualité, une gestion adéquate du stress, et évidemment un évitement (ou un abandon) du tabagisme.
Plus ces mesures sont adoptées tôt dans la vie, rappellent-ils, plus leur effet combiné pourra être important des décennies plus tard. Cela est encore plus pertinent pour les femmes les plus susceptibles de souffrir d’une maladie cardiovasculaire.
«C’est sûr qu’on s’en va vers une médecine qui est plus individualisée, a dit la docteure Forcillo. Chaque patient a ses propres facteurs de risque. Si on teste des biomarqueurs, ça peut nous donner de l’information supplémentaire pour dire que telle femme serait plus à risque qu’une autre, puis de concentrer le suivi ou l’effet d’un traitement de façon plus précoce chez ces femmes-là.»