Une ancienne assistante nie avoir retardé l’approbation d’un mandat d’espionnage

Jim Bronskill, La Presse Canadienne
Une ancienne assistante nie avoir retardé l’approbation d’un mandat d’espionnage

OTTAWA — Une ancienne cheffe de cabinet d’un ministre libéral de la Sécurité publique a nié les allégations selon lesquelles elle aurait travaillé pour retarder l’approbation d’un mandat d’espionnage au début de 2021 parce qu’il touchait directement les opérations du gouvernement Trudeau.

Zita Astravas a qualifié l’allégation de «catégoriquement fausse» au cours d’un témoignage tard mercredi lors d’une enquête fédérale sur l’ingérence étrangère.

L’enquête a appris qu’il avait fallu 54 jours pour que la demande de mandat du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) soit approuvée par Bill Blair, alors ministre de la Sécurité publique.

Le délai moyen de traitement de telles demandes est de quatre à dix jours.

Michelle Tessier, directrice adjointe des opérations du SCRS pendant cette période, a déclaré à l’enquête qu’elle était frustrée par ce retard.

Un calendrier présenté à l’enquête indique que Mme Astravas a assisté à une séance d’information sur la demande de mandat 13 jours après que le SCRS l’a envoyée à la Sécurité publique.

Elle a déclaré à la commission lors d’une séance à huis clos au cours de l’été que les questions qu’elle avait posées lors de la séance d’information étaient typiques de celles qu’elle poserait concernant une telle demande.

Un résumé de ce témoignage, récemment dévoilé, indique qu’elle se souvient d’une conversation distincte au sujet de la liste Vanweenen qui l’accompagne, une liste de personnes qui pourraient être en contact avec la cible du mandat et qui pourraient donc être touchées.

Les responsables fédéraux ont invoqué la sécurité nationale pour refuser de discuter publiquement des personnes que le SCRS espérait surveiller grâce au mandat.

Gib van Ert, avocat du député conservateur Michael Chong, a suggéré à Mme Astravas mercredi qu’après avoir vu «à quel point ce mandat impliquerait le SCRS dans les affaires de votre parti et de votre gouvernement, vous ne vouliez pas qu’il soit exécuté, et s’il devait être exécuté, vous vouliez le ralentir».

Mme Astravas a répondu qu’elle ne pouvait pas mentionner les détails du mandat, «mais je peux vous dire que vos hypothèses sont catégoriquement fausses».

M. Blair, désormais ministre de la Défense, doit témoigner devant la commission d’enquête vendredi.

Il a déjà déclaré à l’enquête à huis clos qu’il avait pris connaissance de la demande de mandat pour la première fois à la date à laquelle il se souvient l’avoir signée.

«Il ne savait pas que son bureau l’avait reçu avant cette date», peut-on lire dans un résumé du témoignage de M. Blair. «Il n’était pas au courant de la date à laquelle son bureau l’avait reçu et personne ne lui a montré les dates antérieures sur les documents.»

Le résumé indique qu’à la date à laquelle il a signé le mandat, il a pris connaissance de discussions et de questions soulevées par son bureau avec le directeur du SCRS et le sous-ministre de la Sécurité publique. «Cependant, il ne savait pas depuis combien de temps le mandat était entre les mains de son bureau.»

Mme Astravas a témoigné mercredi que le directeur du SCRS, David Vigneault, signalait les questions prioritaires et qu’ils travaillaient «avec le directeur et son équipe» afin d’inscrire un point à l’ordre du jour du ministre.

Pendant cette période, il y a eu un certain nombre de contacts impliquant le directeur du SCRS, le ministre et le sous-ministre, a-t-elle déclaré.

«À aucun moment (le mandat) n’a été soulevé comme une question d’urgence.»

Les dernières audiences de la commission d’enquête examinent la capacité des agences fédérales à identifier et à contrer l’ingérence étrangère. Un rapport final doit être présenté d’ici la fin de l’année.

Pas de traîtres à la Chambre des communes

Dans un autre témoignage mercredi, la conseillère à la sécurité nationale Nathalie Drouin a rejeté l’idée qu’il y ait des traîtres à la Chambre des communes, malgré un rapport surprenant d’un organisme de surveillance de l’espionnage qui soulevait des questions sur la loyauté des politiciens.

Le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale (CPSNR) et le renseignement a déclaré en juin que certains parlementaires seraient «des participants mi-consentants ou volontaires aux efforts d’ingérence des États étrangers» dans la politique canadienne.

L’affirmation directe mais vague du CPSNR, un organisme de surveillance du renseignement composé de députés et de sénateurs qui ont prêté serment de confidentialité, a suscité une vague d’inquiétudes quant au fait que des personnes sciemment impliquées dans l’ingérence pourraient toujours être actives en politique.

La conseillère à la sécurité nationale a déclaré mercredi devant la commission d’enquête fédérale sur l’ingérence étrangère que la conclusion du Comité des parlementaires selon laquelle certains députés auraient pu trahir leur pays la mettait très mal à l’aise, car ce n’est pas ce qu’elle a constaté.

Mme Drouin a déclaré à la commission qu’elle avait été mise au courant de comportements inappropriés et d’un manque de jugement de la part de certains politiciens. Mais après avoir examiné les renseignements pertinents, elle n’a vu aucun député responsable d’espionnage, de sabotage ou d’autres activités mettant en danger la sécurité du Canada.

Donner toute autre impression diminue la confiance du public canadien dans le système démocratique, a-t-elle ajouté.

La commissaire Marie-Josée Hogue et son personnel ont identifié et examiné les rapports de renseignement mentionnés dans les versions classifiées et publiques du rapport du CPSNR.

L’enquête a également interrogé des hauts fonctionnaires du gouvernement et des agences de renseignement à huis clos au sujet des découvertes sensibles.

Cependant, Mme Hogue a déclaré qu’elle n’identifierait pas publiquement les parlementaires soupçonnés par le CPSNR d’ingérence.

Elle a prévenu que les allégations spécifiques du rapport du CPSNR sont basées sur des informations classifiées, ce qui signifie que l’enquête ne peut ni les rendre publiques ni même les divulguer aux personnes concernées.

Ainsi, l’enquête ne sera pas en mesure d’offrir aux individus une opportunité significative de se défendre, a déclaré Mme Hogue.

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