HALIFAX — La petite population de baleines noires de l’Atlantique Nord, en danger critique d’extinction, est depuis longtemps confrontée à la consanguinité. Mais une nouvelle étude scientifique, menée par des chercheurs de l’Université Saint Mary’s à Halifax, fait état d’une découverte encourageante.
Même si la consanguinité semble limiter le nombre de veaux nés chaque année, elle n’a pas d’impact sur la diversité génétique, un trait essentiel à la survie de toute espèce.
«Le fait qu’ils conservent cette diversité génétique est un très bon signe pour leur avenir, a souligné Carla Crossman, doctorante au département de biologie de l’université. Nous ne perdons pas la diversité génétique aussi vite que ce serait le cas autrement. (Mais) nous ne savons pas pourquoi.»
En octobre dernier, le Consortium des baleines noires de l’Atlantique Nord estimait qu’il restait 356 baleines noires de l’Atlantique Nord sur la planète.
La nouvelle étude évaluée par des pairs, publiée mercredi dans la revue Royal Society Open Science, indique que les chercheurs ont initialement découvert que la plupart des femelles baleines noires de l’Atlantique Nord ne donnaient pas naissance à des petits tous les trois ans, comme le font généralement les femelles de la population beaucoup plus importante du sud.
«L’intervalle est beaucoup plus élevé dans la population (du nord)», a affirmé Mme Crossman, ajoutant que certaines femelles matures de l’Atlantique Nord n’ont jamais donné naissance.
L’équipe de recherche, qui comprenait des scientifiques d’autres régions du Canada et des États-Unis, a déterminé grâce au séquençage du génome que le niveau de consanguinité de chaque femelle n’avait rien à voir avec sa capacité à donner naissance.
«Il n’y avait pas de relation claire entre le degré de consanguinité d’une femelle et son succès reproductif, a indiqué Carla Crossman. Mais ce que nous avons découvert, c’est que tous les individus de la population avaient une plus grande diversité génétique que ce à quoi on pourrait s’attendre, compte tenu de la taille de la population.»
Grande diversité génétique malgré tout
L’équipe a rapporté une autre découverte clé basée sur des recherches antérieures sur les paires mère-veau connues et les triades mère-père-veau connues: les veaux hautement consanguins n’apparaissaient pas dans la population. Les chercheurs pensent que les fœtus consanguins meurent dans l’utérus.
«Nous pensons qu’il y a une augmentation du taux de perte fœtale due à la consanguinité», a expliqué Mme Crossman.
«Cela explique en partie le faible succès reproductif que nous observons. (…) Quel que soit le mécanisme, il maintient la diversité génétique dans la population, car tous les veaux sont plus diversifiés génétiquement que prévu.»
Ce «mécanisme» a probablement permis aux baleines d’éviter les mutations néfastes causées par la consanguinité, a-t-elle déclaré.
«Cela signifie qu’ils peuvent persister un peu mieux avec une petite taille de population.»
Le nombre de blessures en augmentation
Les résultats de l’équipe pourraient être utilisés pour «recalibrer» les attentes des responsables de la gestion de la population de baleines noires de l’Atlantique Nord, a-t-elle déclaré.
Malgré les bonnes nouvelles concernant la génétique, Mme Crossman a déclaré qu’aucune de ces découvertes n’a beaucoup de sens à moins qu’il n’y ait une diminution substantielle du nombre de baleines tuées par des collisions avec des navires et des enchevêtrements avec des engins de pêche, qui sont les principales causes de mortalité de cette espèce.
L’automne dernier, le Consortium des baleines noires de l’Atlantique Nord – un groupe de scientifiques, de membres de l’industrie et de représentants gouvernementaux qui étudient les baleines – a déclaré que les dernières données montraient que le nombre de blessures d’origine humaine était en augmentation.
En 2022, les décès ne dépassaient pas les naissances – un bon signe – mais les militants pour l’environnement restent inquiets que l’espèce soit encore en voie d’extinction, car bon nombre de ces blessures entraîneront la mort, tandis que d’autres baleines blessées pourraient ne pas être en mesure de se reproduire.
Jusqu’à présent cette saison, cinq baleines noires de l’Atlantique Nord empêtrées ont été repérées dans les eaux canadiennes, dont un mâle adulte connu sous le nom de Dropcloth, repéré samedi au large de la côte nord-est du Nouveau-Brunswick, près de l’île Miscou.