Une prise de sang pourrait permettre de dépister plus tôt la maladie d’Alzheimer

Katrine Desautels, La Presse Canadienne
Une prise de sang pourrait permettre de dépister plus tôt la maladie d’Alzheimer

MONTRÉAL — Des biomarqueurs sanguins permettent aux spécialistes de confirmer plus tôt et avec plus de précision la maladie d’Alzheimer chez les personnes présentant des symptômes cognitifs, soulève une récente étude parue dans la revue médicale internationale JAMA.

Autrement dit, une simple prise de sang permettrait de prendre en charge plus tôt un patient atteint d’alzheimer, ce qui est susceptible d’améliorer sa qualité de vie. «Plus on dépiste tôt, plus on peut sauver les neurones par un traitement qui va stabiliser la maladie», résume Robert Laforce, neurologue et neuropsychologue à la clinique interdisciplinaire de mémoire du CHU de Québec.

Toutefois, ce test sanguin n’est pas encore autorisé au Canada. Dans un courriel transmis à La Presse Canadienne, Santé Canada a expliqué que ce sont les fabricants qui déterminent s’ils soumettront un dispositif à chaque organisme de réglementation international et quand ils le feront. «C’est pourquoi la disponibilité sur le marché peut varier considérablement d’un pays à l’autre», a écrit l’agence.

Santé Canada a indiqué qu’elle est ouverte à la réception et à l’examen d’une demande de licence visant à obtenir l’autorisation d’utilisation au Canada. «Si une entreprise soumet une demande à Santé Canada, celle-ci sera examinée et, si elle répond aux normes de sécurité, d’efficacité et de qualité, sa vente sera autorisée au Canada.»

Dr Laforce a espoir que l’approbation de Santé Canada sera simple puisque les biomarqueurs dont il est question sont déjà utilisés avec d’autres techniques.

«Au Québec, on y a accès avec une ponction lombaire pour examiner le liquide céphalo-rachidien ou encore par une imagerie d’amyloïde, mais là, c’est beaucoup plus simple pour le patient, il a juste à étendre son bras et on fait une piqûre», explique-t-il.

Il n’existe pas encore de remède pour guérir complètement la maladie d’Alzheimer, mais certains traitements sont efficaces lorsque le dépistage se fait tôt. Le neurologue souligne par ailleurs que la perte de mémoire n’est pas le seul symptôme. D’autres secteurs cognitifs sont aussi touchés comme le langage et les fonctions exécutives.

«On sait que si les neurones sont embourbés dans l’amyloïde et qu’il y a une dégénérescence qui se fait en aval de tout cela, les conséquences sont irréversibles, dit-il. On ne peut pas penser renverser le processus une fois qu’il est trop avancé. Par contre, on peut le stabiliser et avoir un impact sur l’évolution de la maladie quand on le prend au début.»

Il existe plusieurs médicaments pour la maladie d’Alzheimer, qui sont utilisés pour compenser un déficit des neurotransmetteurs dans le cerveau, a spécifié Dr Laforce, qui est également professeur de neurologie à la faculté de médecine de l’Université Laval.

Les traitements non pharmacologiques sont également très importants, a-t-il ajouté. La prise en charge par le médecin qui va indiquer à la famille à quoi il faut s’attendre à l’avenir et expliquer les mesures et les dispositions à prendre est un aspect essentiel pour accompagner le patient.

Les biomarqueurs sanguins permettent également d’identifier la maladie d’Alzheimer avec une grande précision diagnostique chez les personnes présentant des symptômes cognitifs.

Les 1213 patients qui ont participé à l’étude ont fait l’objet d’une évaluation clinique en raison de symptômes cognitifs. Ils ont été examinés entre février 2020 et janvier 2024 en Suède. Les résultats portant sur la précision du diagnostic sont convaincants.

Avec une évaluation clinique, les spécialistes de la démence identifient la maladie d’Alzheimer avec une précision diagnostique de 73 %, tandis que cela s’élève à 91 % en utilisant les biomarqueurs sanguins. Pour les médecins de soins primaires, les résultats montrent qu’ils avaient une précision diagnostique de 61 % versus 91 % en utilisant les biomarqueurs sanguins.

«C’est gênant de faire le travail qu’on fait et de se rendre compte qu’avec la clinique seule, quand on pense qu’un patient a la maladie d’Alzheimer, on est correct sept fois sur dix, admet Dr Laforce. Ces outils sont là pour bonifier notre pratique et faire en sorte qu’on arrive au bon diagnostic.»

Lueur d’espoir pour l’avenir

Le dépistage de l’alzheimer n’est pas simple. Il s’agit d’un dépistage d’exclusion, c’est-à-dire qu’il faut exclure toutes les autres causes qui peuvent amener les mêmes symptômes.

Pour diagnostiquer la maladie d’Alzheimer, il est essentiel d’avoir un dépistage cognitif. À elle seule, la prise de sang ne peut pas indiquer le score de mémoire. Le biomarqueur va être là pour aider le médecin dans l’élimination des autres causes et confirmer qu’il s’agit de la maladie d’Alzheimer, a souligné Dr Laforce.

Il fonde beaucoup d’espoir sur deux médicaments, le donanemab et le lécanémab, qui ont été approuvés aux États-Unis, mais dont on attend l’approbation de Santé Canada. Ce traitement a un impact sur la pathologie qui est à la base de la maladie d’Alzheimer. «L’amyloïde est complètement éradiquée avec ces médicaments», affirme-t-il.

Selon le neurologue, nous en sommes seulement aux balbutiements de tout cela. Il a hâte de voir, dans un horizon de cinq ans, quels seront les impacts de ce traitement. «Le fait d’avoir joué sur la pathologie de base, on espère avoir un impact à long terme. Le chapitre n’est pas fini d’écrire», dit-il.

Le contenu en santé de La Presse Canadienne obtient du financement grâce à un partenariat avec l’Association médicale canadienne. La Presse Canadienne est l’unique responsable des choix éditoriaux.

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