Charlotte Robillard-Millette a rapidement affiché ses aptitudes et son caractère

Michel Lamarche, La Presse Canadienne
Charlotte Robillard-Millette a rapidement affiché ses aptitudes et son caractère

MONTREAL — Lorsqu’elle se présente dans une pièce, Charlotte Robillard-Millette attire l’attention. Grande, à 1m80, et mince, la jeune dame aux cheveux blonds se fait aussi remarquer par sa facilité à exprimer ses pensées avec clarté.

Il semble que c’est une qualité qu’elle possédait à un très jeune âge, comme a pu le constater Sébastien Leroux, qui a été son instructeur de tennis pendant environ sept ans avant qu’elle ne se joigne au Centre national de Tennis Canada à l’âge de 14 ans.

«J’entraînais les filles de Bruny Surin à Fontainebleau et Charlotte se trouvait avec son père, tout juste à côté. Elle avait sept ans, six ans peut-être, et je voyais une petite fille qui tenait tête, des fois, à son père. Tu voyais que c’était une fille qui avait du caractère. Son père était venu me voir pour savoir si j’étais intéressé à la ‘coacher’, mais je lui ai dit que je ne les prenais pas si jeunes», a relaté Leroux.

Un an plus tard, Leroux a revu Charlotte et son père, et cette fois, c’est lui qui est allé à la rencontre du paternel pour lui dire qu’il aurait du temps pour sa fille.

«C’est une fille qui était très déterminée, très axée vers les résultats. C’est une perfectionniste», ajoute Leroux, qui a toujours maintenu des relations étroites et chaleureuses avec la Blainvilloise.

Ces traits de caractère ont aidé Robillard-Millette à gravir les échelons dans les rangs juniors. En décembre 2013, à l’âge de 14 ans, elle a gagné le prestigieux tournoi de l’Orange Bowl des moins de 16 ans, en Floride. En 2014, elle a remporté le Championnat canadien U18, d’abord en salle puis à l’extérieur.

En 2015, elle a atteint les quarts de finale du volet junior des Internationaux d’Australie. Plus près de chez nous, la même année, elle a pris part à la finale à Repentigny, où elle s’est inclinée face à sa compatriote Bianca Andreescu. Quelque quatre mois plus tôt, Robillard-Millette avait pris la mesure d’Andreescu en finale d’un tournoi joué en France.

Tous ces exploits l’ont aidé à se hisser au quatrième rang du classement mondial junior féminin en juin 2015, à l’âge de 16 ans.

Une variété de problèmes de santé ont toutefois fait dérailler son parcours au point où elle a interrompu sa carrière en mars 2018, à l’âge de 19 ans, après un revers en qualification au Japon.

Quelque 15 mois plus tard et se sentant mieux, Robillard-Millette a décidé de relancer sa carrière pour des motifs compréhensibles.

«J’avais tellement de potentiel qu’il y avait quelque chose là. Je me sentais impuissante, dans le sens que je n’étais pas allée au bout des choses. Qu’est-ce qui aurait pu arriver? J’ai recommencé à m’entraîner. C’était hyper difficile, douloureux. Le premier entraînement que j’ai fait, j’étais incapable de mettre un service dans le terrain. C’était vraiment dur», se remémore-t-elle.

Tout ce travail devait lui permettre de prendre part à deux tournois ITF en Tunisie, en mars 2020. Elle a participé au premier et gagné trois matchs, dont un du tableau principal, mais la Covid-19 est venue annuler le second.

Confrontée à l’inconnu qu’engendrait alors la pandémie, et consciente des efforts financiers et des sacrifices que nécessiterait une autre tentative de relancer sa carrière professionnelle, elle a plongé dans les études pour son baccalauréat en communications, qu’elle a obtenu en avril dernier.

«Une carrière professionnelle, ça coûte beaucoup d’argent, ça demande beaucoup de temps. Les gens ne réalisent pas que c’est environ 150 000$ par année, et si tu veux faire de l’argent, il faut que tu sois top-100. Pour te rendre top-100 quand tu as un classement zéro parce que tu as arrêté plus qu’un an, ça peut prendre au moins deux ou trois ans, s’il n’y a pas d’embûches et de blessures», souligne-t-elle.

Pour tout jeune athlète aux aptitudes indéniables, une fin de carrière hâtive peut être dure à vivre. Ce fut le cas pour Robillard-Millette, au point où il lui est arrivé d’éteindre le téléviseur pour éviter de regarder un match de tennis féminin et voir à l’œuvre des joueuses contre lesquelles elle avait croisé le fer et, dans certains cas, même vaincues.

«La seule exception, c’était Bianca», confie-t-elle.

«Bianca, c’est différent parce que c’est ma meilleure amie. On est super proches encore aujourd’hui. C’est une belle amitié qui est très précieuse pour moi. Bianca, je la regarde tout le temps, je la supporte, je veux qu’elle gagne.»

Robillard-Millette conserve tout de même de beaux souvenirs de sa carrière de joueuse, et tout particulièrement l’année 2015.

Elle n’oubliera jamais, non plus, sa présence sur le court central de ce qui est maintenant le stade IGA, en 2016, même si elle avait subi l’élimination au premier tour des qualifications face à la Chinoise Shuai Zhang, alors 59e au monde.

«Toute ma famille et mes amis étaient là. Je me rappelle avoir fait un super beau point. J’ai gagné le point et tout le monde s’est mis à applaudir et j’ai eu des frissons. Je pense que c’est la seule fois de ma carrière où j’ai ressenti ça; c’était vraiment spécial.»

Sébastien Leroux croit comprendre les sentiments qui ont habité Robillard-Millette, et aussi ce qu’elle pourra retirer de cette nouvelle phase de sa vie.

«Le tennis, ç’a été toute sa vie, son identité. C’était une joueuse de tennis. Quand tu n’es plus une joueuse de tennis, tu as l’impression de perdre ton identité.»

«(Aujourd’hui), ça lui permet de redonner au tennis et que ça redevienne quelque chose de positif pour elle. Ça fait en sorte qu’elle retrouve un plaisir à travers le tennis.»

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