MONTRÉAL — Ottawa veut s’assurer que les Canadiens roulent en véhicules électriques et mettra en place des exigences pour obliger l’industrie à vendre des véhicules zéro émission, en plus d’investir des sommes importantes pour en faciliter l’achat, des annonces qui réjouissent l’Association des véhicules électriques du Québec.
Dans son nouveau Plan de réduction des émissions pour 2030 publié mardi matin, le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques annonce qu’Ottawa mettra en place une obligation pour que, d’ici 2035, 100 % des ventes de nouveaux véhicules légers, y compris les nouveaux camions à passagers, soient des véhicules zéro émission. À plus court terme, soit d’ici 2026, Ottawa veut qu’au moins 20 % de toutes les nouvelles mises en vente de véhicules légers soient électriques.
D’ici 2030, c’est 60 % des nouveaux véhicules légers qui devront être zéro émission.
La Colombie-Britannique et le Québec ont actuellement des exigences de ventes de véhicules à zéro émission semblables à ce que veut implanter le fédéral, mais elles «manquent de mordant», selon l’Association des véhicules électriques du Québec (AVEQ) qui croit que les nouvelles mesures d’Ottawa auront un impact très important dans la vente des véhicules électriques.
«Le Québec est un petit marché de voitures, c’est 4 % de toute l’Amérique du Nord et on a une norme zéro émission qui n’est pas assez punitive pour que les manufacturiers se forcent à apporter des véhicules électriques au pays», a souligné Simon-Pierre Rioux, le président de l’association.
Il explique «qu’une norme fédérale va permettre au Québec et aux autres provinces d’avoir une part de véhicules qui répond aux demandes des consommateurs parce que présentement ça arrive au compte-goutte, puis les manufacturiers et les constructeurs automobiles rient des consommateurs».
Le président de l’AVEQ a précisé qu’actuellement, l’attente pour certains véhicules électriques est de trois ans.
«C’est très, très long et la technologie a le temps de changer d’ici à ce que la personne obtienne sa voiture.»
Les mesures annoncées dans le plan d’Ottawa réjouissent Andréanne Brazeau, analyste en mobilité chez Équiterre, l’organisme que le ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Steven Guilbeault, a cofondé il y a 30 ans.
«Ça va vraiment venir mettre la pression pour augmenter l’offre de véhicules électriques partout à travers le Canada et le gouvernement fédéral vient de mettre la barre plus haute à l’échelle du pays», a-t-elle dit.
Mais ce qui fait encore plus plaisir à l’analyste en mobilité chez Équiterre, c’est la décision d’Ottawa d’élaborer un règlement qui ferait en sorte que 35 % de tous les véhicules moyens et lourds vendus soient des véhicules zéro émission d’ici 2030.
«C’est la cible la plus ambitieuse en Amérique du Nord, encore plus ambitieuse que celle de la Californie qui a habituellement le leadership pour tout ce qui est de l’électrification des véhicules, donc le gouvernement vient vraiment de faire un grand pas vers l’avant, puis on se réjouit de sa volonté de s’attaquer à ce secteur-là», a souligné Mme Brazeau.
À plus long terme, Ottawa exigerait que «tous les véhicules moyens et lourds vendus soient des véhicules zéro émission d’ici 2040 pour certains types de véhicules, selon la faisabilité».
Élargissement des incitatifs à l’achat
Le gouvernement fédéral compte non seulement reconduire le budget alloué aux incitatifs pour les véhicules électriques, mais également l’élargir.
Actuellement, Ottawa offre une aide maximale de 5000 $ à l’achat ou à la location d’un véhicule électrique neuf.
Dans le Plan de réduction des émissions pour 2030, il est indiqué que «1,7 milliard $ seront consacrés pour élargir le programme Incitatif pour les véhicules zéro émission (iZEV), afin de réduire le coût d’achat des nouveaux véhicules légers électriques».
Le prochain budget fédéral 2022 devrait étendre ce programme pour inclure les véhicules d’occasion ainsi que des modèles de véhicules électriques plus coûteux afin que les nouveaux véhicules utilitaires sport (VUS) et camionnettes qui arrivent sur le marché des véhicules électriques soient admissibles.
Objectif: ajouter 50 000 bornes de recharge
Ottawa entend accélérer l’installation de bornes de recharge de véhicules électriques avec un financement supplémentaire de 400 millions $ «à l’appui de l’objectif du gouvernement d’en ajouter 50 000 au réseau du Canada».
La Banque de l’infrastructure du Canada compte également investir 500 millions $ dans «les infrastructures de recharge et de ravitaillement des véhicules zéro émission».
«C’est un montant excessivement important, c’est substantiel, c’est une excellente nouvelle», a souligné Andréanne Brazeau, d’Équiterre.
L’analyste en mobilité déplore toutefois «l’absence de mesures qui visent à freiner la croissance du parc de véhicules, tant au niveau du nombre de véhicules que de leur taille».
Transport: le quart des GES de tout le pays
Avec 25 % des émissions totales au pays, le secteur des transports du Canada est le deuxième plus grand contributeur d’émissions globales de GES, après le secteur pétrolier et gazier,et l’empreinte carbone des transports a augmenté de 16 % au cours des 17 dernières années.
Le ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Steven Guilbeault, a déclaré dans une entrevue qu’il faudra un peu plus de temps aux transports pour rattraper les autres secteurs en matière de réduction des émissions.
Le rapport indique que d’ici 2030, le secteur devrait être en mesure de réduire ses émissions de 23 % par rapport aux niveaux actuels. «Nous faisons des progrès pour 2030», a déclaré le ministre Guilbeault.
«Mais il y aura encore plus de progrès à venir entre 2030 et 2035.»
À l’échelle régionale, le transport est la principale source de GES dans la majorité des provinces et des territoires. Au Québec, par exemple, le transport est responsable d’environ 40 % des émissions.