MONTRÉAL — Les patineurs de longue piste québécois Laurent Dubreuil et Valérie Maltais ont apprécié le spectacle offert par le nouveau format du Circuit mondial de patinage de vitesse courte piste, qui a récemment effectué ses deux premières escales à Montréal. Mais, selon eux, il ne faut pas s’attendre à voir leur sport suivre cette voie de sitôt.
Lancés dans l’inconnu avec le nouveau Circuit mondial de courte piste, les patineurs canadiens ont brillé avec 14 médailles en deux étapes à Montréal à la fin octobre et au début de novembre. Mais au-delà des résultats, c’est la charge de travail qui a retenu l’attention.
Certains patineurs, dont le Québécois William Dandjinou, ont pris part à six courses masculines, tandis que sa compatriote Florence Brunelle, par exemple, a participé à cinq épreuves individuelles.
Questionné à savoir si ce genre de format serait applicable en longue piste, Dubreuil a rapidement indiqué que ce serait, de son avis, carrément impossible.
«Je comprends la logique du spectacle derrière ça. (…) La différence, en longue piste, c’est que c’est un sport de spécialisation, alors que le courte piste est un sport plus généraliste», a d’abord expliqué Dubreuil en entretien téléphonique avec La Presse Canadienne.
«C’est un crescendo en courte piste: ça part lentement, et le rythme augmente progressivement. Nous, en longue piste, on démarre sur les chapeaux de roue et on finit chaque course complètement vidé. Ce ne sont tout simplement pas les mêmes disciplines», a-t-il ajouté.
Dubreuil a comparé sa discipline à celle de l’ancien sprinter étoile Usain Bolt, qui avait gagné le 100 m aux Jeux olympiques de Rio en 2016 en 9,81 secondes.
«Je me souviens d’avoir entendu Bolt dire qu’il n’avait pu battre son record (9,63) parce qu’il faisait froid ce soir-là et qu’il n’avait disposé que d’une heure et 20 minutes de repos entre les demi-finales et la finale. C’est ça, le sprint. Tu as besoin de chaque minute de repos, car tu es cassé», a-t-il mentionné.
De son côté, Maltais, une ancienne patineuse de courte piste qui s’est tournée vers le longue piste après les Jeux de Pyeongchang de 2018, a vu d’un bon oeil l’adoption du format du Circuit mondial en courte piste. Elle estime cependant qu’il faudrait l’adapter pour qu’il puisse s’appliquer en longue piste.
«Ça pourrait être intéressant d’apporter une sorte de compétition comme celle-là. Quand je pense à mes proches et à mes amis qui viennent me voir en compétition, dans une journée typique, j’effectue un 3000 m et c’est tout. Parfois je participe à deux courses, si je prends part à la poursuite par équipes», a évoqué la patineuse de La Baie
«Le longue piste, c’est une épreuve contre-la-montre, donc chaque course te demande un effort maximal, ce qui n’est pas le cas en courte piste. C’est très taxant. Cependant, pour avoir expérimenté les Championnats du monde à Inzell, en Allemagne, au mois de mars dernier, et avoir participé au 500 m, puis au 3000 m environ une heure et demie plus tard, ça, pour moi, il n’y en a pas de problème. Si on doit faire deux distances, selon celles qui sont choisies, alors ça pourrait devenir intéressant», a-t-elle résumé.
Dubreuil et Maltais s’entendent toutefois sur un point: si une seule «bébitte» pouvait connaître du succès dans un éventuel Circuit mondial de longue piste, ce serait l’Américain de 20 ans Jordan Stolz.
«Il (Stolz) est le seul patineur de l’histoire à avoir gagné le 500 et le 1500 m dans une même Coupe du monde. En comparaison, ce genre d’exploit arrive constamment en courte piste — William Dandjinou l’a fait, Charles Hamelin l’a fait avant lui, le Russe Victor Anh aussi l’a fait, bref, ils sont nombreux —, car les distances sont similaires», a évoqué Dubreuil, qui est devenu champion canadien pour la cinquième fois de sa carrière sur 500 m le mois dernier.
La troisième fois sera-t-elle la bonne pour Dubreuil?
Dubreuil, Maltais ainsi que leurs coéquipiers de l’équipe canadienne de patinage de vitesse longue piste entreprendront leur saison vendredi aux Championnats des quatre continents, à Hachinohe, au Japon.
«Une bonne façon de se mettre en jambe», a confié Maltais.
Dubreuil, qui disputera sa 14e saison en carrière sur le circuit de la Coupe du monde, a indiqué qu’il avait un objectif précis à atteindre cette saison.
«Ça fait deux années que je suis deuxième sur 500 m aux Championnats du monde (derrière Stolz), et mon objectif cette année c’est de le battre. Je veux être champion du monde sur 500 m», a-t-il déclaré, sans hésitation.
Le patineur de Lévis a réitéré du même souffle qu’il ne songe pas à la retraite après les prochains Jeux olympiques d’hiver, bien au contraire.
«C’est sûr que je vais continuer pendant encore au moins une année après les JO, et je caresse même l’ambition de continuer jusqu’en 2030 (aux JO dans les Alpes françaises). Je me projette, car je ne sais pas si j’aurai encore le niveau nécessaire pour rivaliser avec les meilleurs. Je veux continuer, mais pas à tout prix. Si je suis 27e au monde, alors je n’aurais aucun ‘fun’ à faire ça.»
Quant à Maltais, qui est âgée de 34 ans, elle préfère prendre une course à la fois, sans trop réfléchir à l’avenir.
«J’étais en forme (aux Championnats canadiens), mais il me manquait encore des éléments de synchronisme et de ‘timing’ dans mes courses sur 3000 et 1500 m. Je suis tout de même parvenue à assurer ma place sur l’équipe de Coupe du monde», a expliqué la médaillée d’or à la poursuite par équipe aux Jeux de Pékin en 2022.
«C’est correct, à ce stade-ci de la saison, car je veux atteindre mon plein potentiel en février, en prévision des Mondiaux (de Hamar, en Norvège), a-t-elle poursuivi. Ceci étant dit, mon dernier cycle d’entraînements de trois semaines s’est très bien déroulé, et j’ai très hâte au début de la saison en Coupe du monde.»
Et si tout se déroule bien, alors la table sera mise pour les Jeux olympiques de Milan-Cortina, en Italie, dans un peu moins de 15 mois.